Hier avait été un échec.
Un échec violent pour Caesius, qui échouait si peu, si rarement. Il en avait pincé les lèvres, et sa bouche s'était déformée dans une grimace amère.

« Je vous provoquerai en duel demain, professeur. »

Avait-il dit à la fin de cette égalité frustrante.
En vérité, il ne voulait pas gagner. En vérité, il ne cherchait pas à humilier son aîné - au contraire. Il lui avait fallut l'insomnie de sa nuit pour comprendre le dessin de ses propres pulsions ; c'était de l'aide.
Il était profondément agacé qu'il ne soit pas pris en meilleure estime.
Il était profondément agacé qu'il dégage, par ses silences, ses maladresses, sa mollesse, un tel manque d'amour propre.
Il voulait lui apprendre - lui montrer, qu'il pouvait gagner. Caesius ignorait d'où lui venait cette soudaine générosité (lui qu'on fréquentait si peu à cause de son égoïsme), mais c'était bien là.
C'était bien là, et ce jour là, à la fin du cours de potion, il avait attendu son professeur et ils s'étaient rendue dans la salle des duels, en silence.
Il avait levé sa baguette.

« Vous êtes prêt professeur ? Expelliarmus. »

Il aurait dû arrêter.
Il aurait vraiment dû tout arrêter, là, quand il avait devancé le professeur et l'avait conduit jusqu'à la salle des duels.
C'était absurde - c'était injuste, agressif. Caesius n'était pas un quelqu'un qu'on disait gentil.
Et pourtant, c'était ce qu'il essayait de faire - sans le savoir.
Maladroit dans sa froideur.

Il lui lança un sort - mou, bien trop mou, qu'il esquiva d'un mouvement d'épaule. Ca lui arracha une grimace.

« Voyons, professeur. Soyez sérieux. »

Qui était le professeur ? Quelle impertinence. Il leva son bras.

« Expulso ! »

Le feu lui montait aux joues.
Ce n'était encore qu'une délicate teinte rosée - mais sa tempe gonflait, et ses lèvres, trop fines, disparaissaient derrière la dureté de son sérieux.
Il perdait ses moyens. Il prenait ça - un peu - trop à cœur. Il avait raté son sortilège.
Une honte - il raffermit la prise de ses doigts sur la baguette.

Le sortilège lui fonça dessus - mais, c'était encore une fois sans aucune envie.
Sans rien - sans détermination. Pâle, blême comme son professeur.
Il était presque un fantôme.
Il détourna encore son buste et évité la flèche colorée. Il avait envie de monter le ton.

« Professeur. »

Ca sonnait comme un sermont - un dernier avertissement. S'il ne prenait pas ce duel au sérieux - s'il ne prenait pas.
Alors -

« Incendio ! »

Il avait eut mal au coeur.
Il allait trop loin - il n'aurait jamais du lancer ce sortilège. Il n'aurait pas du se laisser à tant de violence - car, c'était ça. Une violence de la frustration - un désir qui n'avait pas sa place.
Il admirait beaucoup ce professeur.
Il aurait aimé qu'il s'admire lui aussi. Mais probablement qu'il n'était pas aussi orgueilleux que lui.

Mais là, il secouait les flammes, il avait l'oeil creux, et Caesius le ventre douloureux. Il aurait dû le laisser tranquille.
Il ne pouvait rien faire pour lui - ce n'était pas son rôle, non ? Il allait le lui dire, et Caesius serait humilié.
Mais peut-être voulait-il qu'il le lui dise et qu'enfin, il prenne conscience de sa force.
Il avait la persuasion qu'un homme très fort se dressait devant lui.

Si fort que son geste défensif l'ébranla et il n'eut pas le temps de se défendre. Le sortilège de stupéfixion le frappa de plein fouet, et Caesius fut allongé au sol pendant une longue minute.
Lorsqu'il fut ranimé, il prit une grande bouffée d'air.
Alors, il sourit.
Il eut même un petit rire, franc et clair.

« Ça, c'était très bien. »

Il lui offrit encore un peu son sourire en se relevant, puis brandit sa baguette.

« Continuons. Je ne vous laisserai pas tranquille tant que vous ne m'aurez pas vaincu et remis à ma place. Petrificus Totalus ! »