« Tout avait commencé avec banalité. Sa journée, ses cours. Ses pauses. Le reste. Alors pourquoi. Pourquoi ? Elle le dévisagea. Lui. Lui et sa présence, lui et ses absences. Lui et ses yeux cacaos. Dis-moi. C’était désespéré, désemparé. Inaudible. Il ne comprendrait pas. Elle se contenta alors d’un sourire poli, d’une moue commune, celle que l’on pave en toutes circonstances. Amertume refoulée. Il allait falloir commencer. Monter sur l’estrade, car il en était ainsi. S’incliner, faire volte face. Puis viendraient la marche, lente, mesurée. Et le sort. Oui. L’attaque. Avait-elle cœur à ? Elle n’avait plus le choix, il était heure, à présent. Quel maléfice lancer ? Une idée lui vint. Malsaine, presque peinée. La demoiselle achève fébrilement son dernier pas, et se retournant, lance vivement :

« Bloclang ! »

Après tout, Vance ;
si nous sommes condamnés au dialogue de sourd.
Autant s’arrêter court.
Je suis désolée.

« Corps et vêtements chutèrent. Séparément, cependant. Quelle ironie. Elle qui un peu plus tôt, toisait avec un certain amusement le muet fesse à terre. Allait-elle se révolter, crier et pester ? C’était mal la connaître. Un sourire mimant l’outrage, notre blonde se redressa, sa grâce en seul nappage.

« Ne plus voir mon corps nu te manque-t-il autant, Vance ?

L’avait-il jamais vu ? Seuls eux le savaient, et des deux, l’un était contraint au silence. Que cela était bon. Bon de reprendre jeu, aussi vieux, déformé et égaré soit-il. Ils s’y plaisaient, que vouliez-vous ? Il n’y avait rien à dire. C’était ainsi. Ils avaient perdu depuis bien trop longtemps la compréhension. Alors ils innovaient. Fourberies et délices. Elle tendit sa baguette, inspirant :

« Orchideus !

Sa vertu dérobée, elle illustrait.
Regarde moi, regardez-nous, regardons-nous. Nous pitoyables, nous humains, nous séparés, retrouvés, détachés.

« Tu t’octroies pudeur, mon cher Cadell ?

« As-tu perdu l’habitude ? Aurait-elle même ajouté, si un rire de l’avait pas cueilli au vol. De toute façon, il s’agissait de Vance, non ? Alors il comprendrait. Car c’était ainsi. Elise le savait. Le connaissait. Ou du moins l’avait connu. Espérait-elle toujours ? Le savoir, j’entends. Qu’importe. Fourbe, délaissant ses fleurs, elle alla à l’encontre de l’aveugle. Qui rira bien rira le dernier.

« Si j’avais été toi, le rouge me serait monté aux joues. Confudo !

Cela n’avait été qu’un murmure lâché à son oreille, puis elle s’était écartée, brandissant baguette. Le sort avait tonné.
Sombre ; Sombre Vance.
Perds-en donc la tête.

N'était-ce pas obscène ?

« Oh Vance, veux-tu jouer ? Mais que faire, quand l’on est figée ? Penser. Alors viennent les idées, fugaces, vives puis intenses. Oserait-elle ? Fort probable. Et dans la pierre se taille un soupçon de sourire. Serait-ce la fourberie qui danse dans ses prunelles ? Voyons, ne soyons pas si péjoratifs. La demoiselle n’a pas le choix, l’informulé la prend au vol, elle se libère d’un simple mais utile finite incantatem. Puis voilà. L’instant malicieux. Elle ne tressaille pas, ne pipe mot. Si la partie t’amuses, alors poursuivons, mon tendre. C’est malsain, elle le sait. Mais qu’importe, n’est-ce pas plaisant ? Les règles ? Y-en a-t-il seulement ? Elise, elle, ne le pense pas. Alors soit, muettement, elle s’invente : Accio habits !

Sois mis à nu, Cadell.
Montre-moi donc les courbes et les formes.
De tes pensées, j’entends.