Mâchoire serrée, phalanges blanchies, Jerry s’avance sur le ring. Toujours aussi droite, toujours aussi rigide – toujours si faite d’acier. La vérité, c’est qu’elle a envie de trembler, s’enfuir – elle la sent bien, la boule de stress qui grossit au fond de son ventre.
Jerry avale sa salive, Jerry relève le menton. Jerry croise le regard de son adversaire.

Et tout de suite, elle est attirée par cette couleur agressive, violente, qui lui pique les rétines. Elle cligne des yeux, une fois, deux. Oh seigneur. Elle doit se battre contre une rousse. Et là, c’est un fin sourire qui se dessine sur les lèvres blêmes de Jerry.

Jerry, l’insupportable Jerry, va vaincre cette engeance. Cette personne sans âme ni coolitude.

Et toute droite qu’elle est, Jerry attends le signal, avant de lancer d’un mouvement souple du poignet et d’une voix rieuse -

« Furunculus ! »

Et elle rigole Jerry, parce qu’elle est un peu garce. Elle trouve que les furoncles vont à ravir à la jeune demoiselle, qu’ils mettent bien en avant son niveau dé-plo-ra-ble.

La rousse riposte, et Jerry se tend comme un arc – à l’affut, commençant à se faire bouffer par l’adrénaline qui bat dans ses veines. Glitterchoum – bam, Jerry ferme les yeux un instant, avant de se rendre compte que c’est raté. Nouveau rire caustique, moqueur – insupportable.

Jerry en rajoute une couche.

« Tarentallegra »

Elle veut voir l’étrange fille rousse boutonneuse et pailletée danser pour elle.

Et ça a marché, ça a marché !
Autant dire que Jerry, ayant déjà une bien trop haute estime d’elle-même, est en train d’atteindre des sommets en matière de vanité. Elle la voit danser, et fait tourner la baguette dans sa main. Elle essaie de sentir, de voir, d’anticiper le moment où elle devra lancer le protego ….

Myrmidon de mordiouf de grenouille.

L’Acapella qu’on lui lance est si puissant qu’il la fait tomber à la renverse, alors qu’elle se met à chanter un ‘lalalalala’ incompréhensible et surtout très honteux. Sentant le rouge monter à ses joues, Jerry se relève, faisant attention à bien remettre sa jupe au millimètre près. L'époussetant avec soin. Jerry la mauvaise joueuse, Jerry la hargneuse. La rousse semble toujours danser, la rousse semble se moquer d'elle, la rousse l’agace.

Foudroyant son adversaire du regard, Jerry lance –

« Stupefix ! »

Et toute colère qu’elle est, Jerry rate son tir. Le doute s’installe au creux de son ventre, et elle sent ses mains devenir moites – l’échec lui fait toujours aussi peur à Jerry. Elle se mord fort les lèvres pour s’empêcher de trembler de frustration – gamine dérangée qu’elle est.

Ca ne va pas, ca ne va pas, ca ne va pas continuer comme ça.
Jerry observe son adversaire lancer son sort – poussant un soupir soulagé lorsque celui-ci échoue. Elle n’aimait pas le bleu.

Redressant son buste, Jerry prend une grande inspiration, et tape le bout de sa baguette dans la paume de sa main – comme on frappe une lampe torche dans l’espoir d’en rallumer les piles. Quand elle expire enfin, ses épaules se détendent, et elle reprend son assaut, un léger sourire ourlant à nouveau le coin de ses lèvres.

« Crache-limaces ! »