Richard était contrarié. Cet état de fait n'avait rien de nouveau, ça faisait plusieurs semaines qu'il était dans cet état. Plusieurs semaines qu'il cherchait à contacter Carys, qu'il tentait de lui parler dans les couloirs ou les salles de cours quand il la croisait, qu'il faisait tout pour essayer de recoller les morceaux et qu'il se heurtait à de l'indifférence au mieux et à un sincère désintérêt dans le reste des cas. Plusieurs semaines qu'il avait apprit à fermer son esprit correctement pour dissimuler à Carys ce qu'elle ne devait pas savoir.

Il n'avait pas grand chose à cacher à Carys à vrai dire, mais la seule chose qu'il lui cachait suffirait à faire couler un bateau qui ne continuer de flotter que parce que lui-même essayait d'évacuer l'eau qui s’infiltrait à l'aide d'un seau. Quand à Carys elle avait une hache à la main et s'amusait à agrandir les brèches déjà formées par Richard en personne. Chacun son tour d'essayer de quitter le navire en route de façon radicale. Si jamais la Gryffondor apprenait qu'il s'en prenait à quelqu'un comme Jodie, il n'aurait aucun doute sur sa réaction et à ce moment-là il n'y aurait plus aucune chance de sauver le bateau, tout simplement parce qu'il n'y en aurait tout plus.

Il soupira bruyamment et passa une main dans ses cheveux en relevant la tête. Rien qu'à l'odeur il su qu'il venait d'arriver dans le couloir savonnette. Ça sentait bon ici, toujours, comme si quelqu'un s'amusait en permanence à répandre du savon odorant sur les murs brillants de propreté. Il y avait même quelques bulles qui flottaient dans l'air, comme si les préfets qui se lavaient à cet étage s'amusaient à prendre des bains avec la porte ouverte. Il aurait bien aimé que ça soit le cas, il avait tellement entendu parler de la beauté de cette salle de bain qu'il rêvait de s'y aventurer un jour.

Il regarda derrière lui, mais il n'y avait personne. À cette heure-là il n'y avait jamais grand monde dans les couloirs de toute façon. Il reporta son regard devant lui et mit à nouveau une main dans ses longs cheveux blonds, toujours frustré de ne pas trouver de solution au problème Carys. Soudain, une porte s'ouvrit et une silhouette apparu et commença à marcher dans sa direction. Étant la seule attraction de ce couloir vide pour le moment, Richard tâcha de mieux la regarder. Elle était loin pour le moment, mais elle lui semblait familière. C'était une fille, aucun doute dessus avec l'uniforme qu'elle portait et ses yeux avait détecté les couleurs de Gryffondor ainsi que de longs cheveux noirs et lisses. Il ne mit pas longtemps à comprendre qui le destin lui avait permit de croiser dans ce couloir.

Soudain un peu plus nerveux, il regarda à nouveau derrière lui, le cœur battant, mais il n'y avait toujours personne. Comment l'aborder ? Comment lui parler ? Lui dire simplement bonjour ? Non, elle allait l'ignorer en lui jetant un regard froid. La retenir par le bras pour lui parler ? Elle allait se sentir agressée non ? Carys continuait d'avancer vers lui sans sembler vouloir lui accorder un regard, ce qui eu le don d'énerver Richard. Quoi ? Elle ne pouvait donc même pas souffrir de le regarder maintenant ? Elle se rapprochait de plus en plus et il n'avait toujours aucune idée de la façon dont il allait bien pouvoir l'aborder. Après toutes les filles qu'il avait réussi à approcher, toutes celles qu'il avait séduit, conquit, il n'arrivait pas à trouver une simple phrase d'accroche pour réussir à parler avec la seule qui comptait vraiment.

Lorsqu'elle arriva enfin à sa hauteur, il ne savait toujours pas quoi faire, la seule chose dont il était conscient, c'était qu'on venait de lui offrir une possibilité et que s'il ne faisait pas quelque chose MAINTENANT, cette opportunité serait perdue à jamais. Alors son cerveau décida soudainement de le lâcher et Richard agit d'une façon qu'il n'avait même pas envisagé, mais qu'il s'était amusé à imaginer parfois, lorsqu'il laissait son esprit vagabonder.

Sa main jaillit pour attraper le poignet de Carys et la tirer brusquement vers lui avant de la faire reculer jusqu'au mur sans lui laisser le temps de réagir. Son autre main la saisit par la nuque pour l'empêcher de tourner la tête et il plaqua ses lèvres sur les siennes avant même qu'elle n'ait le temps d'émettre un son, se collant contre son corps et épousant ses courbes avec un délice évident. La main qui maintenait sa nuque remonta dans ses cheveux. Il savourait ce baiser avec un plaisir sauvage, intense, son impatience l'ayant enfin fait agir malgré la promesse qu'il s'était fait à lui-même de se montrer prévenant et irréprochable pour la séduire. Ses lèvres étaient douces sous les siennes, impérieuses et son corps si désirable semblait pousser le sien au crime. Il laissa durer le baiser autant qu'il lui fallu pour être satisfait, puis il s'écarta, à peine, haletant de ne pas avoir reprit sa respiration et appréciant de sentir le souffle de la jeune femme sur son visage.

-Carys, j'en ai marre, lâcha-t-il, toujours penché sur elle. Je veux que ça marche entre nous, je veux vraiment que ça fonctionne, j'ai fait énormément d'efforts pour toi et tu sais très bien ce que je ressens, mais toi tu n'en fais aucun, tu m'évites, tu me snobes, tu me traites plus bas que terre. Je veux te retrouver, mais on dirait que tout ce qui t'intéresse c'est de mettre le plus de distance entre toi et moi. Je veux te récupérer plus que tout, mais tu ne me donnes aucune indication, aucune marche suivre, aucun indice qui puisse me permettre de savoir si ce que je fais est bien ou pas...

Ses mains la lâchèrent, mais il les posa de part et d'autre d'elle pour qu'elle ne puisse pas s'enfuir cette fois, pour qu'elle ne trouve aucun prétexte pour se défiler. Il se décolla également de son corps, à regret cependant. Il ne voulait pas qu'elle pense qu'il allait la forcer à faire quoi que ce soit de plus que ça, cependant il la dévisageait sans sourire, l'air mortellement sérieux et déterminé à avoir des réponses et surtout, un résultat.

Elle essaya de le gifler, mais Richard intercepta sa main sans mal. Il ne la quitta même pas des yeux pendant tout ce temps, reposant ensuite cette main à côté d'elle. Elle était tellement belle comme ça, en colère, les yeux brillant d'indignations et le regard farouche. Il ne pu retenir le demi-sourire qui fleurit sur ses lèvres lorsqu'elle commença à parler.

-Et tu quoi ? Il avait envie de recommencer, rien que pour vérifier, ses yeux caressant un instant ses lèvres du regards avant de revenir se planter dans ceux de Carys.

La suite de son discours ne lui plu pas plus que ça, mais elle ne l'intimida pas non plus. Ses paroles, au contraire, ne firent que l'encourager un peu plus. Sauf peut-être la conclusion qui semblait sans appel. Cependant Richard était quelqu'un d'obstiné, Richard était un Morgan. Auraient-ils tous aussi bien réussi dans la vie sans une obstination à toute épreuve en plus de leur talent naturel ? Est-ce que leur symbole aurait été un bouledogue s'ils avaient eu pour habitude d'abandonner rapidement quand ils voulaient quelque chose ? Non. Ils n'étaient pas des foutus poissons rouges.

En plus elle se méprenait. Un obstacle à sa vie de libertin ? Mais dans quel monde est-ce qu'elle vivait ? Est-ce qu'il s'acharnerait à essayer de la récupérer, à couper ses fréquentations avec tout le monde, à se montrer ainsi intentionné avec elle s'il la considérait comme un « obstacle » à sa vie de libertin ? Cette conclusion n'était pas très logique, mais on pouvait s'y attendre de la part d'une Gryffondor, sans doute.

Le nom sur la liste était déjà une interrogation plus légitime, bien que du point de vue de Richard elle n'avait jamais fait partie d'une telle liste pour plusieurs raisons. La première était bien sûr qu'il n'avait jamais couché avec elle. La seconde était que jusqu'à quelques semaines il ne se souvenait même pas d'elle. La dernière était qu'une telle liste n'existait pas. Il ne s'amusait pas à recenser les noms des filles auprès desquelles il allait chercher un peu d'affection ou de réconfort. Et puis même ! Elle savait très bien qu'elle était au dessus de tout ça, elle avait lu dans ses pensées, elle avait fouillé dans son cœur. Elle connaissait mieux que personne sa sincérité.

Il leva la main, très doucement, et la passa sur la joue de Carys avant de repousser l'une des mèches de la belle derrière son oreille, caressant la courbe délicate de sa mâchoire au passage. Il voulait avoir le droit de faire ça tout le temps. Il voulait qu'elle cesse d'être furieuse après lui, mais d'un autre côté son regard remplis de flammes d'il y a quelques minutes lui plaisait. Il préférait ça plutôt que son indifférence coutumière qui ne manquait pas de le tuer à petit feu.

-Carys... Arrête ça. Tu as vu toi-même ce que je pensais, tu sais que je suis sincère avec toi. Évidemment que je ne m'attendais pas à ce que tu tombes dans mes bras et c'est pas mon but de tout façon. Pourquoi est-ce que tu ne comprends pas que je veux quelque chose de durable avec toi ? Tu l'as vu pourtant, tu sais ce que je ressens pour toi, tu sais que ce n'est pas le genre de chose qui passe aussi rapidement.

Il soupira et passa une mains dans ses cheveux blonds, frustré qu'elle fasse des difficultés uniquement par simple plaisir d'en faire, semblait-il. Il baissa ses yeux sur la main de Carys et la prit dans la sienne, doucement, caressant ses doigts du pouce. Si elle voulait qu'il la lâche, elle se dégagerait.

-Si tu as aussi peur que je te fasse souffrir, pourquoi est-ce que tu ne fixes pas de conditions ? Je ne sais pas, des règles pour te sentir en sécurité, mais qui permettraient de te prouver que je ne compte pas retourner ma veste au dernier moment... Allez, s'il te plaît, laisse-moi une chance d'être avec toi sans que tu sois froide ou... ou totalement indifférente. Je sais que dans le fond tu as envie de me laisser une chance, mais que tu as juste peur que je fasse à nouveau tout foirer. Laisse-moi te prouver que ça sera pas le cas.

Richard ne se recula pas lorsqu'elle lui tapa la main pour qu'il cesse de lui toucher les cheveux. La haine qu'il lisait dans son regard ne le fit pas flancher non plus. Il y était habitué, à cette expression, à la longue. Il suffisait de voir comment Elyrian le regardait et Elyrian, elle, elle était amoureuse de Richard. Enfin c'est ce qu'il croyait. Inutile de préciser donc qu'un regard chargé de haine ou de mépris n'avait que peu de signification, idem pour une réprimande, aussi sèche soit-elle. Il ne se recula pas plus lorsqu'elle dégagea sa main, mais cessa d'essayer de la bloquer.

-Ce qui me fait dire que tu veux me laisser une chance, ou du moins qu'il me reste un espoir de pouvoir un jour avoir une place dans ton cœur, c'est que ce jour-là, dans la salle de la pensine... T'as répondu à mon baiser quand je t'ai embrassé. Je l'ai pas imaginé ça, murmura-t-il.

À ce moment là seulement, Richard se recula, faisant redescendre la pression qu'il y avait entre eux et laissant respirer Carys. Il se tourna en lui présentant son dos, se grattant le tatouage qui lui courait le long de son cou et l'écoutant parler de règles. Il lâcha un ricanement lorsqu'elle parla de ne pas l'embrasser et de ne pas la toucher sans son contentement. Il avait bien comprit où elle voulait en venir. Quand est-ce qu'elle allait lui sortir la phrase fatidique ? Le ''Je préfère qu'on reste ami'' ? Tiens, d'ailleurs elle lui dit qu'elle ferait des efforts pour ne plus l'éviter s'il respectait ces deux règles. Elle voulait vraiment juste être son ami. Mais Richard ne pourrait pas s'en contenter, ce n'était pas qu'il souhaitait.

Sa main glissa sur sa nuque et il se tourna à nouveau vers elle, examinant ses yeux, cherchant à savoir jusqu'où il pourrait aller, ce qu'il pourrait faire sans qu'elle ne s'offusque, ce qu'il pourrait lui dire, ce qu'il pourrait négocier avec elle. Il n'essaya pas de se rapprocher et laissa une bulle de savon colorée flotter entre eux, la suivant un instant du regard avant de se sentir obliger de la toucher du doigt pour la faire éclater. Peut-être était-ce là un bon résumé de la situation. Il avait vu ses espoirs flotter un instant dans les airs, et maintenant il devait les faire éclater.

-De t'embrasser comme ça ? Tu veux dire de cette façon ? Est-ce que j'ai le droit de t'embrasser autrement ?

Il voulait insisté sur un certain point. Il voulait lui faire comprendre qu'il ne voulait pas d'une relation amicale et rien que l'idée de la fréquenter sans avoir accès à ses lèvres le rendait fou. Rien que maintenant il avait envie de les goûter à nouveau, d'en apprécier la saveur et la texture, de laisser sa langue se glisser entre les frontières charnues pour aller enlacer son alter ego dans la bouche de Carys. Se rendant compte qu'il la dévisageait avec un peu trop d'insistance, il tourna la tête et croisa les bras.

-Pas de contact sans ton consentement ? C'est à dire vraiment rien ? Je ne te touche pas l'épaule pour attirer ton attention, je ne te prends pas la main quand j'en ai envie, je ne touche pas ton visage non plus et je n'ai pas le droit de poser mes mains sur tes hanches ou de te faire des câlins ? Est-ce qu'il me faudra une autorisation signée aussi ou un simple hochement de tête suffira ? Demanda-t-il en levant les yeux au ciel. Il voulait bien qu'elle impose des règles, mais il ne voulait pas non plus que ça devienne n'importe quoi.

Richard l'observa pendant tout le temps qu'elle tripota ses cheveux. Il y avait lui-même mit la main il y avait à peine quelques instants et la sensation que lui avait procuré leur contact s'effaçait déjà de sa mémoire. Il remua les doigts de sa main droite qui ne demandaient qu'à rejoindre ceux de Carys, jouant avec les mèches de ses cheveux sombres. À la place, il croisa les bras sur son torse pour contenir tout désir malvenu de la toucher à nouveau.

Elle n'avait pas l'air de vouloir partir et elle était visiblement nerveuse. Richard se demandait à quoi elle pensait, si elle songeait à lui laisser sa chance et à enfin examiner sa requête d'un peu plus près au lieu de se contenter de l'ignorer purement et simplement. Il considérait avoir mérité une certaine froideur de la part de Carys, mais en revanche il désapprouvait le fait qu'elle refuse de lui laisser ne serait-ce qu'une seule ouverture pour qu'il puisse essayer de l'apprivoiser à nouveau, la redécouvrir et pour qu'elle le redécouvre également.

Il leva les yeux au ciel lorsqu'elle lui intima son refus de se faire embrasser sur les lèvres. Richard n'embrassait pas si mal que ça, il ne comprenait même pas pourquoi elle faisait des difficultés. Après tout c'était elle qui avait décidé de lui laisser sa chance et le fait qu'elle ai répondu à son baiser de l'autre jour était bien la preuve qu'elle appréciait ses baisers. Alors pourquoi est-ce qu'elle refusait de s'y soumettre à nouveau ? Richard avait embrassé des tas de gens sans rien ressentir pour eux. Ciel, il avait même embrassé sa propre cousine ! Ce n'était pas non plus comme s'ils étaient de parfaits inconnu l'un envers l'autre, ils savaient déjà comment leur intérieur buccal était constitué grâce à leur première relation.

-Pourquoi ? C'est si désagréable que ça ? Je ne me rappelle pas que tu t'en sois plain, à l'époque.

En plus Richard n'avait pas la galle et il s'arrangeait pour toujours avec une bonne haleine. Bon, au moins elle lui laissait le droit aux contacts tant qu'il la lâchait immédiatement si elle disait non. Ça n'allait pas être très amusant, Richard pourrait s'estimer chanceux si un jour elle acceptait de lui laisser ne serait-ce qu'effleurer sa main à nouveau. Il fourra d'ailleurs les siennes dans ses poches avant de se tourner également vers l'un des bouts du couloirs. I n'allait pas contester ça aussi, il pouvait comprendre qu'elle souhaite avoir une certaine sécurité vis-à-vis de ses possibles contacts avec Richard.

Il haussa un sourcil lorsqu'elle proposa de qu'ils se voient dans la journée. À présent c'était elle qui l'invitait à sortir, décidément il y avait du progrès. Peut-être aurait-il du la plaquer contre un mur plus tôt. Il aurait même peut-être obtenu de meilleurs résultat ! Carys devait être le genre de fer qu'il fallait battre tant qu'il était encore chaud. Ne surtout pas la laisser se reposer sous peine qu'elle devienne complètement rigide et insensible à toute tentative de nouvelle déformation. Il y penserait à l'avenir. Il leva à nouveau les yeux au ciel lorsqu'elle parla d'une sortie plus que d'un rendez-vous. C'est bon, ils n'avaient plus six ans, ils pouvaient traîner ensemble sans devoir se mettre en rang et se tenir la main.

En revanche, il retint un ricanement lorsqu'elle se claqua le front. C'est bien Carys. Il faut parfois savoir comprendre qu'on raconte des choses stupides et s'arrêter avant qu'elles ne se transforment en absurdités encore plus immenses. C'était bien un truc de femmes ça. Lui au moins prenait le temps de réfléchir avant de parler. Il sortit les mains de ses poches et toucha le tatouage sur son poignet droit.

-J'éviterais de recommencer à l'avenir. Le même tour n'allait pas fonctionner deux fois sur Carys, elle risquait simplement de s'offusquer. Il se décontracta légèrement. Je serais heureux de faire une euh... sortie avec toi, aujourd'hui. Il réfléchit un instant. Pourquoi pas au lac ?

Richard ne répondit pas à ça. Elle savait très bien de quoi leur baiser avait avait le déclenchement. La fin du pari. Le début de la descente aux enfers courte mais brutale qu'il lui avait fait subir. Si ce baiser n'avait eu aucune conséquence, il l'aurait embrassé bien plus tôt, il n'aurait pas hésité. Là... il avait été obligé de faire traîner les choses, de savourer simplement le plaisir de sa compagnie à ces côté, de se dire qu'il sortait avec Carys Wheler et qu'il en était heureux malgré toutes les conséquences que ça impliquerait pour lui et pour elle.

Elle était amoureuse avant. Ces mots étaient à la fois d'une cruauté sans nom à son égard et d'une douceur infinie, ayant le don de lui apporter le réconfort d'une caresse, l'espoir que tout n'était pas perdu, qu'elle avait su l'aimer et qu'elle saurait recommencer, mais ayant également celui de lui labourer le ventre de ses griffes cruelles et d'étreindre son cœur entre les pattes à l'étreinte mortelle que représentait le regret et la désillusion. Ce n'était plus le cas maintenant. Il avait perdu quelque chose qu'il aurait du mal à récupérer. Évidemment qu'elle était tombée amoureuse une fois. Il avait tout fait pour. À présent Carys savait à quoi s'attendre de sa part et sa méfiance n'en était que renforcée.

Il n'écouta qu'à moitié la phrase qui suivit. Elle n'avait pas trouvé le baiser agréable, il allait devoir réviser sa technique. Une petite voix dans sa tête lui demanda vicieusement sur qui il pourrait bien s'entraîner sans que ça se sache et il la fit taire rapidement. Ce n'était pas le moment de se planter et de dire ou faire n'importe quoi. Un seul faux pas et ça serait la chute, sauf que cette fois-ci il ne pourrait compter sur rien pour l'aider à se relever. La patience de Carys avait ses limite elle aussi et il ferait bien de ne pas les sur-estimer.

-Je pense que je peux comprendre ça. D'un autre côté, elle n'avait qu'à pas être aussi tentante au naturel. Ce n'était pas de la faute de Richard.

Richard se souvenait de leur premier baiser, au bord de ce lac. Avec un peu de chance les souvenirs flottant dans ces lieux pourraient lui rappeler la tendresse dont il savait être capable envers elle, du souvenir d'un baiser qui n'avait été ni volé, ni arraché de force au détour d'un couloir. Un vrai baiser, doux, qui témoignait de tous les respect et l'amour qu'il éprouvait alors pour elle et qu'il éprouvait encore aujourd'hui. Pour ce qui était de l'amour en tout cas. Il respectait Carys, c'était sûr, mais sans doute un peu moins qu'avant. Ça reviendrait avec le reste.

Il regarda dehors. Il n'y avait pas beaucoup de monde dans le château à cette heure-là et le parc était tout aussi désert. Puisqu'elle le proposait et qu'elle semblait pour le moment être consentante et même disposée à y aller, autant en profiter non ? En plus cette odeur de trop propre trop savonneux commençait à devenir écœurante pour Richard. Il se tourna vers Carys à nouveau et lui sourit, mais le regard n'y était pour le moment pas.

-Allons-y maintenant. Autant profiter du soleil, déclara-t-il.