Elle ne la verrait plus dans les couloirs. Elle ne la verrait plus dehors non plus. Elise ne serait pas sagement plantée, les pieds dans l’herbe, un balai près de la taille. Elise s’en allait. Il avait fallu un an à Sloan pour comprendre combien elle appréciait la présence d’Elise. Et maintenant elle s’en allait. Un accent douloureux soulevait les phrases de la blonde, la jeune batteuse essayait de ne pas se noyer dedans. Sloan voudrait s’en aller, peut-être parce qu’elle n’a jamais su dire au revoir et que ce matin, le terrain a des allures de cimetière. C’est trop tôt pour faire son deuil, trop tôt. Il y a plein de trucs qu’elles ont pas encore fait. Des excursions qu’elles s’étaient promises de mener à bien ( ou a mal ), non ce n’est pas fini, ça ne peut pas se finir là, comme ça. C’est comme un film où le héros s’en va avant la fin, c’est dramatique, triste, ça pique ses yeux. « Je sais que ça te chagrine. Je sais, on était une équipe sympa. » Ses baskets foulaient le sol lentement, elle fixait ses pieds. Le genre de longues absences qu’elle avait les années d’avant, à chercher quoi regarder. Elle ne regardait pas Elise.

Chaque fois que leurs yeux se croisaient, elle voyait cela comme un adieu. Un adieu un peu cruel qui se colorait en gris et en bleu, leurs uniformes collés l’un à l’autre par leurs deux bras. « Moi aussi je voudrais te laisser une fringue. Tu te souviens de la fois ou, tu as eu des verrues plein le visage? » Sans la laisser intacte, le souvenir fit grimper ses joues en centimètres jusque découvrir ses petites dents. « C’était juste avant le bal, mais tu es venue m’aider à m’habiller quand même, et j’étais vraiment soulagée de t’avoir avec moi. » Parce qu’elle était terrorisée ce jour-là, vraiment. Sloan qui découvrait les joies de l’amitié, avec Elise. C’était spécial.

Comment pouvait-elle savoir. « Elise tu sais parfois. Je me demande si tu vas bien. » Les yeux foncés de Sloan percèrent le décor qui s’était calmé un moment. Sloan s’était arrêtée sur le chemin de terre, avait regardé au loin. La tour de Rowena, les gosses qui commençaient à se presser sous la brume parce qu’il faisait froid. Tout ça. Elle, Elise, Wesley, le quidditch, les bons jours, les mauvais jours. « Moi je ne suis pas sûre de comprendre. » Doucement ses jambes remuaient, dans un genre de tic nerveux qui contrebalançait avec les mots d’Elise affluant dans sa tête. Elle n’était pas douée avec ça. Le temps passait et elle ne se sentait pas plus sage, elle ne se sentait pas si serdaigle que ça, elle se sentait loin. « Comment on s’aime. » Son sourire s’agrandit soudain, elle ramena ses cheveux derrière son oreille. « J’en sais rien du tout. Et toi, où est-ce-que tu vas maintenant? »