Être sorcier dans le Londres magique, c'est vraiment tranquille... Sauf lorsque trois frères, les Bumblebee, décident de révolutionner le monde magique en proposant trois idées qui s'opposent : révéler les sorciers aux moldus, intégrer les créatures à la société, ou tout laisser en l'état en se méfiant bien des deux autres. Le monde magique anglais est en ébullition à mesure que les trois candidats s'opposent, laissant un peu leurs charges respectives à l'abandon au profit de leur campagne. C'est ainsi qu'à Poudlard, un joyeux bazar règne souvent en l'absence du directeur, et que les créatures de tous poils envahissent peu à peu les villes sorcières pour le meilleur comme pour le pire !
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la physique des catastrophes • ulysse

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Gryffondor
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Ben Whitsett
Ben Whitsett
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Ven 5 Juin - 23:52
(également le dpf. j'espère que tu ne m'en veux pas. toi-même tu sais en toute quiétude.)


L'esprit suspendu entre la dernière heure du jour et les tous premiers instants de noir, et puis les mains, les froides mains faméliques, qui entrent et disparaissent dans l'ombre invertébrée.

La nuque qui se tord dans l'embrasure d'une porte qui n'existe pas, qui se rêve seulement, la tête qui se baisse au-dessus d'un vide singulier. Et puis la dernière fibre du soleil, hissée dans les hauteurs, qui salue le bout de la terre avant de mourir.

Les pierres endormies, noires, sages, les pierres de la tour dans la lourdeur épaisse qu'il fallait bien appeler nuit, le versant de la tour, noir, sage, dans l'étroite fadeur, dans le manque de lueurs, dans un velouté de solitude étonnamment favorable aux pensées les plus sombres.

La nuit ne tombe pas, d'ordinaire, les hommes tombent ; la nuit s'étale paresseusement à la manière d'un voile au devant des yeux, elle se déroule pareille à un serpent aux longs anneaux, et telle une spirale, un hélix du noir, elle s'imprime au firmament. La dernière lumière attend la première ombre, puis viennent lune, étoiles, astres dorés à l'or fin, fragments d'univers surpris par un léger parfum ; une odeur de peau fatiguée. La peau de Ben était en miettes, elle n'en pouvait plus d'être, d'exister dans son état d'éternelle flétrissure.

Ben détestait les hauteurs, il était un fils du vertige. Le petit d'homme qui avait voulu s'élever n'avait trouvé dans l'altitude qu'un froid polaire à lui geler le rire. Sous la peau, un duvet, loin du ramage de l'enfant qui s'envole pour avaler le soleil ; sur les bras, une brûlure, la blessure sur la peau d'opale du rêveur qu'on dépouille après qu'il aie voulu faire la nique au monde. Trouver un piédestal pas trop petit, puisqu'il aimait regarder de haut, et pas trop grand, puisqu'il en perdait l'équilibre, trouver de tels trésors avait été une quête longue et dure, une quête dont on ne voyait pas plus le bout que le sens.

Il observait intensément les fêlures du bas. Les sillons les plus petits, les grains, les pliures longitudinales gravées sur la peau des pierres, l'image momentanée d'une plongée dans l'invisible -
Ben avait peur. Ben n'avait pas eu peur depuis longtemps. Ben se sentait bien. Ben ne s'était jamais senti bien.

L'inquiétude faisait remonter dans son ventre une nausée trop éprouvée. Elle lui était gravée sur le long de la pulpe, et il la haïssait tendrement en la devinant sous ses ongles ; il la haïssait dans un mutisme de rouille, il haïssait son irrésolution, ouverte à la lame, pareille à une plaie toute neuve. Allez, Ben ! Il faut sauter, à présent.

Ben se rappelait, en imaginant sa peau immobile au-dessus d'un abysse, qu'il devait à nouveau bouger ses membres, ses flasques membres - ses membres qui vibraient toujours trop, qui se hérissaient à grand bruit, et plutôt que la douleur, qu'il aurait préféré, la nullité de toute sensation lui oxyda la peau. Au bout de ses organes il y avait du givre, des lamelles infimes épinglées à son sang, de tous petits débris de froid mordant. Et bientôt, alors que l'été s'infusait partout, bientôt il serait l'hiver.

Le battement perdu du palpitant de Ben restait prisonnier de son thorax : il ne respirait pas pour lui, mais pour l'entité insoutenable qu'il faisait vivre à l'intérieur lui, l'entité quasiment morte, la faiblesse sempiternelle noyée dans des rires bêtes et de vieilles fêlures de l'esprit. Qu'elle mette désormais un terme à sa douleur ! Il lui donnerait le repos vrai, le repos de la fin.
Il était presque dommage que personne ne puisse assister à son dernier effort de théâtralité.

Le bout des doigts bleus d'être resté si longtemps à l'air libre, le bout des lèvres pâteux d'avoir été si longtemps entrouvertes, Ben entreprit de fermer les yeux, et de mémoire toiser les rebuts qui lui restaient de sa propre image.

De tête il dénombra la somme de ses doigts, de ses yeux et de ses vertèbres saillantes. Ses ongles pénétrèrent sa peau raffermie par le vent et il se sentit sous les phalanges des os qu'il n'avait jamais eu.
Alors Ben eut un rire amer, et son rire se perdit dans la brûlure de l'air.

Il leva un pied.


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Ulysse Kerouac
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Sam 6 Juin - 14:15
vous êtes calligraphie et calme olympien, mais aussi vaste sonnet de mousseline. vous êtes psaume antique et manifeste belliqueux. vous êtes une découpe cynique et une arrogance innocente, une glace sans tain et la plus belle des jeunesses. vous êtes un pacte d'amitié et une langue de coton. vous êtes décousus et désuets, un mirage dans le désert, un sourire accidentel et toutes les initiales du monde.

il s'était installé là aux heures péremptoires de clarté, l'intellectuel post-dîner en semaine. sans qu'il ne prête attention à la fenêtre, le crépuscule avait fait sombrer chaque rayon avec l'efficacité de l'habitude, et très vite plus rien n'était lumière. la nuit n'est pas insidieuse, la nuit tombe.

les hommes ne tombent pas. ulysse serre la conviction contre son coeur, et clame à toute allure et dans son intimité que c'est dans l'homme que résident les miracles. c'est le créateur ultime, le dompteur de toute chose, le meilleur parti-pris. délibère et décide, tranche et conclut. l'homme laisse la chute à mère nature. la nuit tombe.

pour ulysse, toujours vite. il balance, s'introduit et pense. puis soudain, bien trop tôt à son goût, l'obscurité choit, très conquérante. destrier noir et toute l'imagerie poétique. pendant ce temps, rien n'a réellement le temps d'être fait. tout est là, la beauté du concept. l'homme fait tellement, mais n'accomplit rien. la finalité ultime d'ulysse est d'accomplir en toute oisiveté mais sans paresse. il s'efforcera toute sa vie sans parfaire l'idéal, mais ultimement là était le but. on s'égare.

présentement, le sujet est passif, sur une couche (émeraude pour les descriptifs, verte pour tout autre). au creux de la paume, un ouvrage superflu, dans les yeux un désintérêt profond. tous deux sont là pour la frime.

ulysse ne rêve pas particulièrement à l'aventure, gryffondor a déjà raflé la conception. les kerouacs sont fait de l'étoffe du social, discrétion et réceptions, machinations politiques, habiles diplomates aux pulsions réfrénées. mais là, quelque chose l'agite et l'anime dans la poitrine, quelque chose à la parure résolument rouge et d'augure mauvaise. quelque chose de dérangeant et de fâcheux, et les lignes de mots se mélangent devant un regard qui n'en a plus rien à foutre.

il lance le livre en direction de (et non nécessairement sur) une chaise. se relève avec souplesse notoirement involontaire. puis promène ses phalanges délicates et tremblantes sur son chat gris dans l'espoir de s'apaiser.

mais rien n'y fait, rien, RIEN N'Y FAIT. il enfle un présage gros comme une météorite dans sa poitrine d'accoutumée imperturbable, et sa tête lui tourne avec férocité. il faut qu'il aille respirer quelque chose. le sentiment est assurément claustrophobie, piégé qu'il est sous le lac dans sa salle commune, même s'il n'est résolument plus de première année. il se lève et pique vers la sortie, peu importe les préfets, il papillonnera des cils.  

où est l'air dans ce château si hermétique ? sécurité publique ou souhait d'étouffer ? d'autant plus qu'ulysse ne veut pas se contenter de fenêtre entrouverte à la dérobée, il veut du grand oxygène et du grand soulagement, se soulever le coeur en hauteur avec la majesté alléchante. il veut être un héros romantique, le vent en poupe. d'un coup, un sentiment d'urgence germe dans chacun de ses membres et il s'élance.

le voilà propulsé, un projectile sprintant à travers escaliers mouvants et couloirs déserts, lumières qui flanchent et tableaux offensés, entre bruits suspects d'élèves faisant la ronde, entre toute la faune de l'école et les reflets moirés de fantômes n'ayant rien remarqué. son ascension est délice, plus encore alors que le vent mordant effleure ses joues et -

une silhouette de grand conquérant révolu, le plus prodigieux dictateur, ultime bourgeon de tout ce qu'il y a de plus mauvais. le rire le plus terrifiant secoue sa moelle. la vision arrache ses sens comme si elle était imbibée de curare. sa propre histoire s'est retournée contre lui, et la panique le possède. la folie de ben se doit d'être contagieuse, parce qu'il comprend, et même en ayant compris, il s'avance. il comprend bien trop vite, il s'étonne lui-même, et aucun sentiment ne fait sens. mais qui sait ce qu'il est commun de ressenti devant une mission d'une si impensable témérité ? quelles sont les normes ? qu'est-ce qui se fait ?

— « la froide surface de la rivière m'a imploré un baiser »

le citation éclot spontanément comme une thèse, la plus raisonnable des possibilités. winston hughes trouve les mots lorsqu'ulysse les perd, et il se laisse emporter par sa propre mémoire, laissant ses acquis et s'appropriant les leurs. il a toujours aimé subtiliser.

— « je quitte la vie pour entrer dans l'Histoire »

quelques pas encore, un geste voluptueux pour marquer le dernier mot, toujours dans l'excès oratoire. que dit-on pour dissuader un dément de l'auto-destruction ? et si on réussit, a-t-on eu raison d'entreprendre le sauvetage?

— « il vaut mieux disparaître en flammes que dépérir lentement »

il arrête son approche. les mains croisées derrière son dos, en recul, servile. son ton est si neutre qu'il en est irréel.

— tous les grands hommes ont eu de grandes dernières paroles. pourquoi tant de discrétion ?

soudain, tout est trop. la fraîcheur obnubile et enivre, et il ne sait plus bien qui il est. le climat rampe, mélodie inquiétante. mais il ne tremble pas. la nuit tombe, l'homme ne tombera pas.
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Mar 9 Juin - 13:53

Il y avait des heures de la nuit ou plus rien ne faisait sens. Les derniers prétextes agonisaient au coin du ciel et toute la raison du monde gisait dans un angle mort. Paisiblement ou péniblement, il fallait accepter que les étoiles sucent les os, rongent le cerveau, purgent l'esprit des peaux mortes ; celles des phrases toutes faites. Ben depuis toujours avait mis un point d'honneur à ne jamais se justifier, mais dès lors qu'il s'était abîmé sur les étages les plus bas c'était à son honneur qu'il avait mis un point.

Les genoux de Ben avaient frappé le noyau du monde. Il avait fait trembler son axe avec le poids de son corps. Il n'y avait pas si longtemps qu'il se pensait encore capitaine des révolutions terrestres - il y croyait dur comme aux mirages jusqu'à ce que son front s'écorche sur un étonnant récif, puis jusqu'à ce que la lumière tourne, lui présente son dos, et enfin disparaisse. Il ne fallut qu'un petit coup de pouce vers le fond pour que la pénombre l'engloutisse.

Benvolio Whitsett, le pied au-dessus de la planète, annihilé dans l'âme et la chair par un petit point de pression. Il frémissait d'un ostentatoire adieu pour tout ce qu'il ne voyait plus alors qu'à demi.

- La froide surface de la rivière m'a imploré un baiser-

A ce moment d'effondrement parfait, dans le gel pur de ses pensées, cette voix naquit à la croisée du silence. Enfantée du vent, ou des pierres, ou du néant, elle lui perça le tympan comme le dard d'un hyménoptère.

- Je quitte la vie pour entrer dans l'Histoire-

Ce n'était que les esquisses d'une réflexion et un morceau de fatigue qui corrompait sa pensée ; c'était juste une ombre en sursis qui disparaissait à la fin d'un clignement des paupières doublement lasses : à la fois de la nuit et de la vie. Etait-ce son délire, ou bien un vrai garçon, dans la vraie chaleur, sur la tour, vraiment penché près de ses bras ?
Troublé par le moment et piqué par la surprise, il s'arrêta. Il écouta. Son pied ne tremblait pas en surplombant le vide.

- Il vaut mieux disparaître en flammes que dépérir lentement-

Ses épaules étaient roides et son silence était un silence de mort infesté de mouches qui vrombissaient sans vacarme. C'était pour que ressorte mieux le vocable très particulier de l'invité surprise. En la personne de cet ostrogoth du soir qui lui rendait une visite impromptue sur le balcon de la mort, un impardonnable soleil s'était mis à éclairer la faiblesse du gryffon pour mieux l'accuser.

Un concerto sans saveur se jouait alors à huis-clos, sous ce ciel navré, cette nuit ratée ; un concerto visiblement écrit pour quatre mains. Qu'il était cruel de venir moquer une dernière fois les miettes du tyran. Viendraient-il aussi expectorer sur sa tombe ?

- Tous les grands hommes ont eu de grandes dernières paroles. Pourquoi tant de discrétion ?

C'était une question qui sourdait comme une flèche au creux de l'ombre.
Certains obscurs inconnus avaient l'art et la manière d'entretenir le mystère. Le recul lui offrait cette confortable sécurité de la distance, avec laquelle il pouvait jauger de toute la pitoyable envergure de Ben, rétréci à vue d'oeil sous ses guenilles.
Ben appréciait ces interludes autant qu'il les détestait, et à ce stade d'absolue déliquescence de lui-même, il ignorait si cette apparition relevait du miracle ou de la disgrâce. Quelque part dans son ventricule il y avait tout de même cette toute petite scorie honteuse de soulagement, relayée désormais dans son sang. Alors son coeur battait toujours. Sûr qu'il se serait laissé tomber, pourtant ! Il ne se posait pas la question.

Ben ne quitta pas le rebord duquel un courant ascendant l'aurait fait glisser. L'équilibre ténu de son corps, parfaitement découpé dans le disque d'une lune froide, rendait physique la tension de l'instant. Un tangible péril le tenait à peine suspendu aux pierres.

Ce goût du grandiloquent que Ben chérissait et qu'il pensait porté disparu allumait à nouveau des sources lumineuses dans ses hémisphères. Des couches de folie furieuse, comme les strates d'une nappe phréatique qu'il aurait eu dans les profondeurs du cerveau, s'animèrent doucement, après avoir été sclérosées par la basse température des hauteurs.
Ben regarda Ulysse. La légende ne dit pas si Ulysse en fit autant.

- Une dernière pierre tirée sur l'invalide. C'était improbable, mais pas à exclure.

Bien sûr, il crut au pied de nez.
Il ne pouvait entreprendre de bouger trop de muscles ou il vacillerait. Il passa seulement la main dans le creuset de ses cernes, un geste tragicomique qui souligna l'affreuse maigreur de son visage. Ces derniers mois au château avaient été frugaux de bien des façons.

Ben s'efforça d'éteindre son regard rouge pour lui donner une froideur en dessous de zéro.

- Jolie litanie. Tu peux te foutre de moi tout ton content, je ne me défendrais pas ce soir. Mais attention ! C'est le seul soir.

Le dernier.

Ben, face à Ulysse, dont il détaillait les généreuses boucles blondes, écoutait battre ses organes. Tout son système interne qui se dépliait dans toute la lenteur qu'exigeait la nuit, toute la torpeur des membres ensevelis sous la belle nocturne, tous les nerfs désenroulés sous la piqûre du couvre-feu outrepassé depuis longtemps.

Il sentait son estomac et ses tripes et ses fibres de toutes espèces sorties, précipitées au dehors, empoignées par les mains douces du petit blond propret, qui mettait une application particulière à choisir ses mots sous la caresse du noir d'encre. C'était malin. Lui qui était parvenu au bout de ses hésitations. Tout un travail sur lui-même serait dans quelques instants à refaire entier.

Il s'accroupit - il ornementa ses lèvres du sourire le plus obséquieux dont il était capable.

- Je te les donne, mes dernières paroles. Tu en veux ?


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Ulysse Kerouac
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Mer 24 Juin - 17:29
il lui avait vraiment répondu ? il avait parlé ?

ses mains restent sages et cachées. sa bouche s'entrouvre, comme soudain animée d'une quelconque réplique avant de se refermer, mais il ne baisse pas la tête.

il y a longtemps de ça déjà, il s'était dit que le monde est bien trop multipolaire. une infinité de colonies d'opinions fondées autour d'une infinité de centres, de l'infinité sur d'éternels foutus kilomètres. tout peut être milieu et tout peut être périmètre. chaque chose, en son temps, est possible.

et les probabilités résonnent dans chaque action. celle d'une conséquence inéluctable, d'une débouchée sectionnée par une monumentale erreur. ulysse vit cette réalité à travers une détresse quotidienne d'atteindre le summun de sa performance. un retournement tragique et obsessionnel de son narcissisme. il se doit de rassembler la totalité de ton art du débat.

et il analyse chaque issue, calcule presque les chances et évalue les risques. le contrôle s'échappe de ses mains comme du sable trop chaud, pendant que toute l'impuissance de sa condition noue son estomac vide. benvolio est un engrenage fou et imprédictible, qui ne peut que le rendre le plus impressionnant des êtres.

quelle est la meilleure technique, de quelle substance verbale est faite la réussite de ce putain de labyrinthe ? si compassion, alors empathie, et l'empathie c'est être influençable, et les influencés puent la faiblesse. alors la compassion n'est pas la bonne stratégie devant cette majuscule trop sensible pour les basiques. dans son instinct du social, dans toutes ses discussions, dans l'entiereté de son expérience et ses plus profondes perceptions, il puise gentiment le savoir-faire.

ulysse ne peut s'amener à répondre dans les premières secondes. il est si inébranlable à l'accoutumée. impavide même en émettant le plus cruel commentaire. là, il paraît distinctement désaxé. la voix posée, mais les yeux noircis. il entame une lente marche, de profil, faisant mine de réfléchir. de ses lèvres vermeille nait un susurrement discret.

— les derniers mots, puis l'épitaphe,

devant tant de dédication sincère, il n'est pas étonnant de remettre la réalité de la scène en question. ulysse lui-même n'en avalerait jamais le récit. d'accoutumée, c'est la présence rassurante et le regard bienveillant. le mètre 80 à la quinzaine et une allure étrange dont on ne se moque que pour avoir quelque chose à placer. c'est le compliment semi-honnête et remerciements balayés d'un regard entendu, la promesse de caser avec une charmante demoiselle. c'est finalement, dans le creux de l'œil, un profond dédain. une gracieuse politesse dégueulasse.

alors comment maintenant s'amener à annihiler la volonté de l'autodestruction et réveiller l'instinct de conservation ? comment décourager l'ex-tyran pyrétique du démantelement consciencieux alors même que le geste était l'ultime action poétique ? il se lèche les lèvres.

— et me voilà malgré moi ingénieur de tes funérailles. tu me laisseras le temps d'y réfléchir ?

le tutoiement sonne faux, comme s'il s'adressait à quelqu'un de trop important pour la familiarité.

là, ben est pire que l'indépendance juvénile. pire que l'allure de gamin qui incite à la révolution, pire encore que la démarche impétueuse et autoritaire et la folie du contrôle des sociopathes. c'est bien plus que ça. même son aspiration à la primeauté ne suffit à expliquer son magnétisme.

qu'est-ce que c'était exhilarant. exhilarant, dément, purement bestial. ses tempes pulsent d'impatience et il se trouve dans un étrange état, chancelant de la folie au calme. c'est plus profond qu'une simple suprématie, car ben était l'appel sourd et bourdonnant du pouvoir de l'homme sur l'homme.

mais qu'est-ce qu'ulysse aimerait pouvoir lui dire "fais pas le con, viens on va se coucher" et éviter les braves tirades. le compliqué avait le vice de l'exténuer.

— je dois avouer que c'est inattendu, même pour toi. ne voudrais-tu pas règner sur des milliers de neurones jusqu'à la fin des temps ?

la réponse lui semble évidente. un sourire quasi-complice de celui qui se veut side-kick du majeur méchant, visiblement tout séduit par l'appât du malfaiteur amoral, de la grandeur de celui qui se hisse hors-compétition à cause d'un je-ne-sais-quoi trop difficile à expliquer.

puis son sourire se fâne un peu avec la vitesse de la réalisation. le temps de gloire n'est jamais terminé pour ulysse, et ce n'est que trop tard qu'il rattrape la réalité des autres. il en délie ses mains de consternation.

— à moins que ce soit ici il esquisse un mouvement circulaire que tu cherches une grimace dégoûtée, il crache presque la rédemption ?

le poids trop lyrique du mot stagne sur sa langue. il se serait senti timide s'il n'était pas aussi pris de court.
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Jeu 9 Juil - 16:11
Il se hissa debout en faisant le bruit lourd des os qui craquent sous la chair, celui de ses rotules trop souvent déboîtées se remettaient à leur place dans un déclic de peau. Le visage albugineux se creusait d'un sourire dense, la joie funéraire tissait des couronnes d'étincelles au-dessus de son crâne, et Ben ne se sentait ni particulièrement vivant, ni particulièrement survivant. Tout au plus, il existait.

Ce n'est pas que Ben soit en vie - c'est qu'il est tenu en vie, attaché à elle par un petit filament glissé jusqu'à son coeur. La vie n'a jamais voulu de Ben, elle a toujours tenté de le mettre sur la touche, de le laisser sur le bas-côté de l'univers ou bien de le recracher dans l'enfer auquel il appartient. Mais personne ne peut rendre Ben à l'enfer, pas même la vie, cette vie de poussière qui ne cesse jamais de retomber, cette vie de charbon noir qui lui grave sur la couenne des marques indélébiles, cette vie volatile, cette vie combustible qui se reflète par un jeu de miroirs dans l'alcool à brûler de ses yeux. Ce garçon à ses côtés devait bien le savoir, avec ses petits boucles ruisselantes d'un or exténuant ; l'enfer a refusé Ben et son demi regard qui étouffe le soleil - ce serait lui faire un trop grand plaisir.

- Réfléchis tout ton content.

La voix est un brasier qui crépite et qui craque. Dans les veines de Ben, le sang a une odeur de lave. Des fragments de basalte se heurtent à ses artères. Tout craque et se divise sous la noirceur d'un cri replié dans sa gorge, lorsqu'il se dissout en un murmure obscène, le son de la tour bourdonne, le corps devient atone, ses os d'obsidienne s'effritent en eux-même. Ben pue le feu, l'incendie criminel ; inconsolable Néron accroché aux pieds de la cité caniculaire, Ben était une montagne - non, Ben n'était pas une montagne, Ben était le Vésuve - Ben était sa propre fin.

- Mais pas trop longtemps, quand même, pas toute la nuit. On se languit de moi là-bas.

Ben parlait de ce là-bas comme s'il parlait de sa chambre, de sa petite couche noire sur laquelle s'endormir pour ne pas se réveiller. Il alla chercher avec sa main spasmodique le bout de sa baguette, glissée à sa ceinture comme un vieux bout de bois, et une étincelle en jaillit quand ses bras ivres la brandirent vers une quelconque étoile. Lumos ! De la lumière pour le premier homme qui tombe. De la lumière aussi pour celui qui l'observe.

- Je ne vaincrais plus personne. Je ne règnerais plus sur personne. Pas ce soir, ni tous les autres soir, et c'est fini, ce combat de chiens.

Ben pantelait et abritait son oeil unique d'une main d'écorché, car il y avait trop de lumière qui se détachait du corps proche de ce garçon, trop de lueurs subites qui glissaient vers sa peau gardée froide par la nuit. La nuit, voilà ce qu'il était venu chercher, il n'y avait pas assez de nuit dans les yeux du petit blond, pas assez de noirceurs dans les coutures de son veston. Ben encore vaguement debout s'enfonçait dans ses décombres : il emplissait ses blessures d'une poussière alcaline, épinglait à sa chair des morceaux de silice et forçait dans ses poumons un gaz ionisé. Ben cherchait la brûlure comme le chien son maître ; il était après la douleur dans une chasse organique où la proie et le chasseur se troublaient au fond du vide pour se faire indistincts. Sur son épithélium, une ébullition de souffrance sculptait des formes vives. Elle leur donnait une substance, et leur donnait un prénom. Celui de Ben surgissait alors en macabre surbrillance.

Il descendit de son rebord avec les tremblements de l'animal blessé. Il devait se cramponner à tout ce qui était possible, à tout ce qui existait, mais plus rien ne pouvait tout à fait le soutenir ; un pas de travers et il sombrait au fond du vide. C'était très bien : tout devait continuer dans ce sens. À la recherche d'un pilier pour ne pas tomber en miettes, Ben s'effondra sur le garçon, les mains écrasées sur ses petites épaules, trop petites pour soutenir le poids de son horreur, trop petites pour supporter le solde de ses infamies.

Toucher l'autre, il y aspirait encore, il aspirait à fracasser sa peau sur le récif de cette autre peau, il ne voulait qu'une dernière jonction cutanée entre deux êtres tristement solidaires. Il voulait que l'on sente à quel point il avait froid.

- Il va falloir que tu me donnes ton prénom. Tu seras mon dernier souvenir.

Le rire était rauque sur ses lèvres fendues - il était difficile de sécréter assez de salive dans les muqueuses de sa gorge pour donner à ses paroles un air humain. C'était des sons, des mugissements de bête, loin du lied immaculé qui coulait de la bouche de son laquais du soir.

Peu importe ce qu'il lui chantait avec sa voix chérubine ! Le lyrisme avait bon dos. Ben ferait le saut de l'ange au fond d'une mer d'acide. Un abysse sulfurique le réduirait à néant. Rien ne pourrait enlever Ben à sa dernière calamité, à ses incandescences sinistres, rien ne pourrait l'arracher si bien à la douleur ancienne que la douleur nouvelle. Ben se serait, pendant sa courte vie, rompu à toutes les éruptions.

Fatigué par le poids de l'invisible qui se heurtait à ses propres omoplates, il se tenait encore à celles d'Ulysse, dernier rempart avant le terme. S'il s'écartait de lui, s'il le repoussait juste un peu, Ben s'écroulerait alors.


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Ulysse Kerouac
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Sam 26 Sep - 22:31
c'était impensable, c'était comme une flamme infinie qui s'éteint. la neige éternelle qui fond, médiocre. le pathétique déclin du jour, l'effondrement de toute métaphore, de toute pensée, de tout instinct primal. la déchéance tragique et livide de tout le foutu empire romain. toutes les couronnes, tous les diadèmes, toutes les tiares de lierre se brisent. chaque prière sacrée et sincère se révélant facétieuse, la divinité qui l'abandonne. chaque discours politique, clos dans le silence, sans incidence.

c'était comme la passion qui sauvait le déchu, le coup fatal qui apporte la rédemption, une tragédie qui se finit bien, une mort heureuse, un début qui ne commence jamais, un sang-pur humble, une maladie bénévolente, une violence calme, un hurlement étouffé, une grandeur minuscule, une révolte impassive. c'était le pur oxymore du sentiment, lorsqu'ulysse fixait cet être faible et simple et mauvais.

un grand dénouement se déroule au climax, c'est selon ulysse la règle de l'épopée. ainsi, les grands gardent leur honneur, et prennent le départ avec un sourire plein de dignité. une mort simple et belle. ici, il n'y avait rien d'organique. la souffrance de voir détruit quelque chose de beau, pour la première fois. d'habitude, pourtant, il s'endormait de la passive dépression, de l'omniprésente anxiété, de l'ennuyeuse tristesse. mais là, tout entier, il tremblait. le patricien ébranlé par un flot d'émotions pures et fortes et jamais, jamais bienvenues.

alors voilà, sur son corps il s'effondre. métaphore même de ce qu'il projette sur son esprit. un lourd poids de doute et de responsabilité étrangère. il était si froid. il reste immobile quelques instants, avec cette masse sur ses épaules.

et cette résolue résignation, cet au revoir presque anodin. comme une opportunité qui se présente, rien de plus. mais ce n'était pas rien, CE N'ETAIT PAS RIEN. pourquoi ne réalisait-il pas? pourquoi tant d'égoïsme? quel trépas narcissique, se disait ulysse. quelle injustice j'endure ici, et pourquoi moi d'ailleurs?

alors ulysse reserre exponentiellement sa poigne sur cet organisme, cette substance presque cadavérique, ce déchet. il était sa muse et son maître et son empereur. une sombre tâche d'influence négative, un vulgaire éteau de mauvaises intentions. il était ce qu'il y avait de plus perfide et de plus magnétique. il ferait une épatante dépouille, mais il refusait de l'orchestrer dans la démarche.

il reserre sa poigne donc, et sent ce flot d'énergie, ces veines d'ultime vitalité. c'étaient des cellules sous ses mains crispées, c'étaient des pensées sous cette décoiffure. un coeur qui bat, de manière ordonnée, raisonnée et cruelle. chaque once de force est une perte de contrôle du grand benvolio, alors il reserre. il reserre encore.

enfin à son oreille, il susurre. et sa voix tremble affreusement.

— vous me dégoutez cracha-t-il, un être beau n'a pas le droit de s'enlaidir

le contact physique de cette ardente catastrophe brûle chacun de ses nerfs, brise tout code éthique, toute morale inculquée, tout contrôle parental. il a une main raide sur sa nuque et un bras contracté autour de son dos. il avait l'impression brisée d'emmagasiner le momentum terrible et meurtrier de ce garçon. il avait l'impression que s'il relâchait, s'il rabaissait sa garde ne serait-ce qu'une seconde, il allait s'élancer et tomber et devenir une poupée désarticulée avec un sourire terrible, terrible et des yeux vides, très très vides et plus jamais malicieux. pour la première fois de sa vie, les pensées d'ulysse ne se concentrent plus sur lui, sur sa personne ou comment il est perçu, mais sur la vie frêle d'une autre entité. il était si, si froid.

whitsett est dos au vide, à quelques centimètres du précipice. et si ulysse poussait, s'il produisait en effet la plus maigre impulsion, relaxait ses muscles, il n'était plus. il était soudain si paniqué, son souffle calme est hyperventilation en l'espace d'une seconde. un hurlement naît et meurt en un instant.

soudain il fait volte-face, si vite, emportant la créature dans une explosion de fermeté si étrangère au serpentards. il le pousse avec un superlatif de vigueur ou de volonté, comme vous voulez, vraiment, mais il le pousse à terre, humiliation au plus près du sens étymologique. soudain, voilà leurs positions inversées, c'est l'expansion rassurante de la distance entre le rebord et le presque-défunt. il se tient grand, un grand ulysse de quinze ans contre les dix-sept sagesses de ben. mais ulysse ne sait même plus son propre prénom.

— tu n'as pas le droit, ce n'est pas toi qui décides il prononce à travers une mâchoire tassée par l'annonce de larmes

il se sent si supérieur et à la fois effacé, le coeur dans le gosier et la poitrine creuse. il n'y a pas assez d'oxygène dans le lieu le plus oxygéné du château.

— tu n'as pas le droit,

et il savait que cette vision sera brûlée sur ses rétines pour toute la putain d'éternité, cette performance à succès qui vaut chaque vers prononcé de l'histoire, chaque belle parole de l'univers, toute.... - alors ulysse dit de la merde. il hurle maintenant, entre hystérie et calme terrifiant, mal fait, pathologique.

—c'est les gallions qui te manquent? je te donnerai cent gallions pour chaque mètre qui nous sépare du sol. c'est la poésie, l'excitation? le calme? c'est la beauté? qu'est-ce que tu veux, toi? intellectuel en colère? t'es tellement au-dessus de la vie que tu t'en fous comme ça, ouais?

il y avait de chaudes larmes qui s'agglutinaient dangereusement, comme s'il réalisait à peine l'étendue de la tragédie, le revers d'un joli art dramatique.

— ton dernier souvenir dont tu ne connais même pas le prénom, c'est pas grand, ça. c'est pas beau, putain.

dans son timbre, il y avait la levée tumultueuse. il y avait de l'honneur entre deux voleurs, à présent. ulysse tombe à genoux, dernier rempart entre ben et le vide. les autres s'étaient depuis bien longtemps évaporés. ulysse est à son niveau maintenant. il est vrai et cru et monstrueux, quelque part. l'émotion humaine a toujours cet effet.

— ta gueule avec tes grands projets de suicide. je m'appelle ulysse kerouac, mais je ne serai pas ton dernier souvenir. je ne te laisserai pas.
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Ben Whitsett
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Lun 15 Fév - 3:06
dans l'ivresse ben jette un voile ardent par dessus le monde.

il lui déclare son amour incendiaire, sa passion calcination, ses promesses de brûlures toutes nimbées de drames qui ont des reflets ridicules. dois-je te rappeler la fournaise, ben, demande ben à lui-même.

il est rougeoyant et enrobe de braises ses bras levés, étendus en croix au sol maintenant que toute la viande de sa personne y est précipitée. il s'y est aplati, avec ulysse, comme une montagne emboutie par une autre montagne, et ils devenaient un creux, une double colline du vide.

un feu naissait. un feu dévorant. il se donnait la vie lui-même au fond d'un oeil. maintenant c'était à nouveau possible de faire couler le plasma et trembler la douleur. tu me fais mal, ulysse ! ulysse, tu m'écrases. fais ça bien, que mon souffle se perde et que mon esprit s'espace de lui-même.

ben ne pouvait plus se mettre debout. il fait plus bon mourir que vivre lorsque sa tristesse dépasse de façon humiliante sa fierté. on n'est plus bon à rien, il faut se jeter du haut de quelque part. plus on est haut et plus on peut prendre la mesure de son grand ridicule. le ridicule est au moins aussi grand que la souffrance et la souffrance n'a pas de précédent dans l'histoire de la vie de ben, alors il ne peut, de toute évidence, concevoir d'après. pas cette fois soustraite à l'habitude.

la réalité, la nuit, la réalité de la nuit tout autour d'ulysse devenait dioptre à l'indice de réfraction profond qui se romprait bientôt sous une masse d'eau. la masse d'eau des larmes d'ulysse crèverait bientôt la fine membrane.

il ne parlait plus mais il vociférait. et ses cris rentraient sous la peau de ben. pas à la manière dont ben faisait rentrer ses cris dans les oreilles des gens, comme des cafards ou des chenilles processionnaires ; ils rentraient comme un onguent, comme un encens, ils rentraient en lui sans violer l'espace et  ilscréaient du lien.

ben connait les points de pression de cette maladie mais frapper, frapper ça ne suffit pas à mutiler le lien ; frapper le lien c'est comme frapper sa propre viande pour l'attendrir et c'est ainsi le multiplier indéfiniment, puisqu'en réalité le lien est un hydre. ulysse avait intronisé un hydre quelque part dans le ventre de ben.

- allons, ne sois pas ridicule. tu ne me connais pas. pourquoi devrais-tu me regretter ?

ben se sent dans le ventre remuer l'hydre qui creuse et qui croît, là où il y a le plus de détresse et le plus d'effroi et de désemparement ; et puis il se souvient que tout ceci revient à se battre contre le mouvement circulaire que la terre fait autour d'elle-même et à se battre contre une gravité qui ne veut pas relâcher ses secrets. il a du mal à ne pas hoqueter car sa poitrine se soulève dans une douleur qui l'immerge. est-ce qu'il se noie ? il n'a plus pied. est-ce qu'il est tard ou tôt ? est-ce qu'il fait froid ? la gravité a disparu dans le silence.

toute sa chaleur est dynamitée de froid, il ne s'imagine pas surmonter ce piton et il ne s'imagine plus mourir. conserver en son ventre un lien cher plutôt que de le tuer d'un coup... c'est absurde ? ce n'est pas lui ?

ben se met à pleurer. il ne peut pas faire autrement, il ne peut pas faire. il n'y a rien d'autre qui soit possible. ben a le visage de saint-sébastien au dessus d'un gouffre : ses lèvres se gonflent et se voilent d'une lumière blafarde vomie par la nuit. sa tête se penche au-dessus de son épaule tendue par la révulsion et ses yeux rougis par un brasier sans chaleur s'étirent sous leurs paupières.

- arrête maintenant. tu ne correspond à rien. tu m'empêche de faire les choses correctement. tu m'empêches. tu m'empêches de mourir. tu m'exaspères, arrête. tu ne sais rien. je suis fatigué.

les mots se changent en lueurs qui s'extirpent difficilement des profondeurs de sa trachée. sa langue est lourde et s'effondre à l'intérieur de sa bouche. il lève un bras, le seul qu'il puisse bouger parce que l'autre agrippe son ventre galvadé par d'atroces et belles déchirures. il lève une main, une main encore préhensile, une main qui peut saisir. il attrape celle d'ulysse agenouillé.

- mais ne pars pas, d'accord ?

alors c'est ça tes dernières paroles avant de mourir, espèce de podenco décharné, pauvre chien, galgo à poils ras qui se noie dans des pleurs tiède en espérant échapper au rien ? quel crétin des atolls tu nous fais en espérant échapper à la vie... elle est belle la gueule de ton assassinat, t'as fait salle comble comme tu voulais, t'as fait le saut de la fin contre tes murs de pierre ?

ben se fustigeait depuis les remparts de sa propre cervelle. il avait une formidable vue plongeante sur les ruines de sa personne. le parapet de sa conscience offrait de sa personne un spectacle méphitique, quelque chose d'imprenable, d'immonde, d'émétique. sa propre peau ne pouvait plus se supporter.

la nuit fait un bruit fracassant en tombant sur la personne de ben mais le silence est tellement lourd... ben trouve tout ce qu'il peut pour agiter la mort et lui donner une vibration supérieure à la puissance de la vie tout ce qu'il peut pour surpasser la surface du fantôme incroyablement géant laissé par ulysse.

- s'il te plaît : aide-moi à me relever.

tendre une main de lumière à un être de pestilence n'avait rien de judicieux, mais avait tout d'humain.


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