Grayson était dans les couloirs. Encore. La légende disait qu’il lui arrivait d’aller en cours, mais dans l’ensemble, c’était quand les Professeurs étaient vraiment trop mécontents et son père vraiment trop occupé pour s’en charger… Parce que même si le Gryffondor n’avait rien d’une lumière, il avait la décence d’essayer de rester à Poudlard, malgré ses notes pitoyables et son comportement déplorable. Enfin, notes pitoyables… C’était pas si mal, vu son taux d’absentéisme relativement élevé – quoique vraiment ridicule à côté de celui de Dux Windsor, ce très agaçant élève de Serdaigle qui n’était, pour le coup, jamais présent, et avait des résultats incroyables. Il l’avait d’ailleurs pris en grippe, ce mec, mais il était bien trop doué en magie pour être une cible valable : il ne sortait pas souvent de la tour où, à ce qu’on disait, il passait le gros de son temps à dormir, et quand ça arrivait, il était toujours trop proche de sa baguette pour laisser le temps à Gray de faire quoi que ce soit. Décidément très agaçant, cet intello.
Mais bref, nous nous écartons du sujet, sujet qui n’aime pas qu’on parle de qui que ce soit d’autres que lui, d’ailleurs. Grayson était donc dans les couloirs, où il s’était amusé à soulever un premier année à bout de bras. Le pauvre gamin, qui venait de rater son cours, se trémoussait depuis une bonne dizaine de minutes dans l’espoir de réussir à poser ses pieds au sol, mais le Gryffondor était bien trop fort et trop grand pour lui laisser cette opportunité. Même si son bras fatiguait clairement – il avait du en changer une fois déjà. Voir ce pauvre petit être – un Serdaigle, encore, comme quoi – tenter désespérément de s’en sortir l’amusait follement, mais ce dernier paraissait abandonner tout espoir, et il avait quasiment arrêté de se débattre. Ce qui rendait le jeu vachement moins amusant.
« Ben alors, on fatigue mon petit ? On a tous les deux raté not’ cours, donc j’ai tout mon temps. »
A l’évocation du cours qu’il venait de rater, le Serdaigle ne put empêcher une moue catastrophée d’apparaître sur son visage. Moue qui fit éclater d’un rire lourd Grayson, qui avait décidément le QI d’une larve de musard. Grayson, qui s’apprêtait à répliquer quelque chose quand il entendit des pas. Les préfets étaient tout aussi discrets que lui, vraiment. Sans hésiter un seul instant, il ramena son bras – le première année étant au bout du dit bras – et enferma sa victime dans une étreinte ressemblant vaguement, de loin et dans le noir, à un câlin de grand frère à son petit frère. C’en était presque mignon. La pauvre petite chose était quasiment étouffée, si bien qu’il ne pouvait pu parler, et c’est ainsi que Gray vit arriver… Ludovic. Ah, c’était pas plus mal : si le Préfet était connu pour ses retenues salées, les deux Gryffondor ne s’entendaient pas si mal – ils s’entendaient même bien, si on comparait leur relation à celle que Gray pouvait avoir avec n’importe quel autre Préfet. Grand sourire.
« Salut Ludo, j’suis en train de réconforter le petit parce qu’il a raté son cours, et il est très triste. »
Mytho, gros mytho. Mais relativement crédible, il le repose au sol et lui lance, avec un regard évoquant vaguement celui d’un tueur en série un brin schizo, et signifiant clairement qu’il a intérêt à filer sans dire un mot s’il ne veut pas finir pétrifié dans un des placards de Ronove :
« T’as qu’à travailler à la bibli pour rattraper ton retard ! »
La crédibilité de Gray n’est pas forte. Mais si Ludovic est dans un bon jour, nul doute qu’il lui passera ce petit écart pas franchement dramatique. Surtout que le Serdaigle a déjà pris ses jambes à son cou, peu désireux de rester une seconde de plus dans les bras du grand méchant loup. Grand sourire innocent de Grayson, qui attend le verdict.