Calvin était un préfet. C'était une chose importante à préciser, du moins pour lui. Il aimait l'autorité que représentait son titre et le droit que cela lui conférait de répandre l'ordre un peu partout où il passait. Lorsqu'il passait dans les couloirs, les gens serraient les fesses, rajustaient leurs uniformes, se plongeaient soudainement dans la plus studieuse des révisions et cessaient de manière générale toute activité susceptible de causer du désordre.

Calvin n'était pourtant pas méchant. Il n'était juste pas comme Pete qu'il admirait cependant de tout son être. Pete était beau. Pete était charmant. Pete aidait son prochain naturellement, tout comme Calvin, mais Calvin avait plus de mal à approcher les autres. Les autres avaient également plus de mal à approcher Calvin. Là où Pete transpirait la confiance et les bonnes intentions, Calvin n'était que sécheresse et froideur. Il était au service des autres, mais il n'avait pas assez de confiance en lui pour sympathiser avec qui que ce soit. Malgré tout, quand quelqu'un avait un problème grave, quand quelqu'un avait peur, c'est vers l'imposant Calvin que l'on se tournait, il avait bien plus l'air près à protéger quelqu'un que le fragile et pourtant si talentueux Pete.

Le pas de Calvin n'était pas calme lorsqu'il surgit dans le couloir savonnette. Un élève terrifié était venu lui dire que son ami s'était fait attaquer par quelqu'un ici et Calvin avait cru comprendre que c'était un élève de sa propre maison qui était impliqué dans cette attaque. Pour Calvin, ça ne pouvait pas passer. Lorsqu'il vit qui était le coupable, ses yeux lancèrent des éclairs.

-Rosenbach ! cracha-t-il. Range cette baguette immédiatement ! Tu auras une retenue pour avoir utilisé la magie dans les couloirs et sur un autre élève en plus.

Il ne sortit pas la sienne. Il ne la sortirait qu'en dernier recours. Il détestait la violence. Comme si Serpentard avait besoin de ça.

Calvin plissa les yeux et s'arrêta sous la menace de la baguette. La sienne était toujours dans sa poche, mais il ne cherchait pas la bagarre avec elle. Il ne voulait pas se battre, il voulait qu'elle se rende, qu'elle accepte enfin l'autorité et qu'elle cesse de faire toutes ces imbécilités qui pouvaient coûter des points à leur maison.

-Le but de cette école de magie n'est pas de créer l'anarchie dans les couloirs. Poudlard est un haut lieu, respecté, et c'est justement parce qu'on peut marcher dans les couloirs sans avoir peur qu'un sortilège nous tombe dessus. Arrête de te faire passer pour plus bête que tu ne l'es. Range cette baguette et suis-moi, sinon je vais être obligé de t'envoyer voir le professeur Emerald.

Il avait assené ça d'un ton ferme, sans appel. On lui avait confié un devoir, celui de faire respecter le règlement dans le château et ce n'était pas une élève de sa propre maison qui allait le faire échouer dans cette mission. Surtout pas Amethyste Rosenbach.

-Et moi je ne suis pas d'humeur à devoir supporter ton insolence, gronda-t-il. Je crois que tu oublies que tu me dois le respect, Rosenbach.

Il ne fit pas un geste pour avancer, toujours sous la menace de l'arme de la Serpentard, le visage n'offrant qu'une expression sombre et déterminé à son adversaire. C'était lorsqu'il devait faire respecter l'ordre qu'il était le plus à l'aise, qu'il avait le moins peur du regard des gens. Il se fichait pas mal qu'on lui parle des brûlures qui le défiguraient lorsqu'il devait venir en aide à quelqu'un.

Calvin ne se laissa pas décontenancer par son insolence. Oui elle lui devait le respect. Cependant pour pouvoir le lui accorder il aurait fallu qu'elle sache ce que c'était et pour le moment ça n'était pas le cas. Comment apprendre le respect à quelqu'un comme Amethyste ?

-Je ne mets mon nez nulle part tant que ça ne concerne pas le règlement. Si tu te tiens à carreaux je ne t'approche pas et ça tu le sais très bien. Mais ce que tu fais là, ce n'est pas se tenir à carreaux.

Il ne bougeait toujours pas. Amethyste était assez cinglée pour lui lancer un sort, il le savait, mais il n'avait pas le droit d'utiliser sa baguette dans les couloirs et de toute façon il ne souhaitait pas le faire. Pas de violence. Pas de combat. Tout pouvait se résoudre pas la simple discussion.

-Il finira par perdre patience avec toi Amethyste. Il ne s'était même pas rendu compte qu'il l'appelait par son prénom. Tu ne fais pas d'efforts. Tu à l'air de constamment toujours tout faire pour t'enfoncer. Où est le problème ? Pourquoi avoir tiré sur ce garçon ? Est-ce qu'il t'avait provoqué ?

Elle n'avait pas la tête à ça. Parfait, maintenant il devait se sacrifier aux humeurs de madame. Elle le prenait pour un valet ou quoi ? Il avait un travail à accomplir et il ne partirait pas d'ici sans l'avoir effectivement accomplit. Le problème c'est qu'elle se fichait bien des retenues et des punitions. S'il voulait régler le problème, il devait savoir pourquoi elle faisait ça.

-Pourquoi est-ce que tu es toujours comme ça ?

Un éclair de tristesse passa dans les yeux de Calvin, rapidement remplacé par sa détermination de toujours. Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait vraiment pas qui il était. Sans doute était-ce normal, il ne devait pas vraiment avoir le visage ou l'attitude de quelqu'un qui s'en fait pour les autres. Pourtant...

-Oui. Je m'en fais pour toi. Aussi bizarre que ça puisse paraître.

Il s'inquiétait toujours pour les autres. On ne faisait pas des entorses au règlement juste par plaisir. On le faisait parce que quelque part, on avait mal. Comme cette fille sous la table, dans la bibliothèque. Comme ce garçon qui n'arrêtait pas de coucher à droite à gauche simplement pour obtenir un peu d'attention. Comme Amethyste, visiblement, toujours pleine de colère envers tout le monde.

-Ce n'est pas de la provocation. Le couloir est assez grand pour que deux personnes se croisent. Tu n'aurais pas du le faire et tu le sais très bien. Pourquoi l'avoir fait ?

Il ne détourna pas le regard, même en sentant la baguette d'Amethyste qui s'enfonçait dans son torse. Il ne sortirait pas la sienne. De toute façon, c'était trop tard pour ça.

-Parce que si personne ne s'occupe de faire respecter les règles, personne ne les respecterait, répondit-il simplement, ses yeux également fixés dans les prunelles froides de son vis-à-vis.