Juliet se réveilla toute fraîche et dispose ce matin-là, heureuse de commencer une nouvelle journée dans la belle et parfaite école de sorcellerie de Poudlard. Elle irait petit-déjeuner, et puis, comme c'était le week-end, elle passerait toute la journée avec sa meilleure amie Wendy, et ce serait vraiment chouette. Bien sûr, elle avait aussi des devoirs à faire, mais ça elle décidait de l'ignorer pour le moment. Elle y penserait bien assez tôt.

Elle jeta un coup d'oeil vers le baldaquin de Wendy. Les rideaux étaient toujours tirés, elle dormait encore alors. Elle eut un petit sourire et alla dans la salle de bain pour se débarbouiller. Et là, arrivée devant le miroir… Horreur ! Damnation ! Son visage, son pauvre visage, grêlé, défiguré par des pustules horribles, est-ce que ce seraient… Mais oui, c'étaient des verrues ! Eurk. C'était vraiment dégoûtant. Vraiment très, très dégoûtant. Et puis tout de suite, la première pensée qui lui vint à l'esprit : il ne fallait pas que Wendy la voie comme ça ! Après l'image de son visage horrible serait incrusté dans sa mémoire et elle ne pourrait plus regarder Juliet sans exploser de rire ou avoir envie de vomir. Et ça, Juliet ne le voulait surtout, surtout pas. Elle voulait rester jolie, même dans l'esprit de Wendy ! Alors, sa décision fut prise : aujourd'hui, tant que son problème de verrue ne serait pas résolu, elle éviterait scrupuleusement sa meilleure amie.

Du coup, elle s'habilla et se prépara très vite, et glissa sur la table de chevet de son amie un petit mot qui expliquait qu'elle avait un cours de rattrapage ce matin-là et qu'elle ne pourrait pas être avec elle pendant ce temps. Puis, elle se rua dans la salle commune et demanda à la cantonade si quelqu'un savait ce qui lui arrivait, espérant qu'une bonne âme lui viendrait en aide. Ca arriverait sûrement, il n'y avait que des bonnes âmes à Poufsouffle, de toutes façons. Le problème c'est que ce matin-là, il était encore un peu tôt et il n'y avait qu'un petit groupe de sixième années dans la salle commune. L'un d'eux, qui en avait visiblement marre qu'on lui crie dans les oreilles à six heures du matin, lui dit :

"Oh, mais je vois tout à fait ce qui s'est passé ! Un, euh… Muttiluttiplouc a du rentrer dans ton dortoir et te piquer. C'est un signe de très grande amitié chez eux. Tu devrais essayer de le retrouver."

Juliet ne s'en remettait pas. Une créature magique voulait être son amie ! Elle allait avoir un ami Muttiluttiplouc ! Ca devait être très intéressant comme bestiole, et très intelligent aussi pour avoir des rituels aussi prononcés, peut-être même une culture, qui sait ! Elle ne se sentait pas de joie, la petite. Sans même demander à quoi cette créature pouvait bien ressembler, elle sortit de la salle commune en courant, lançant un "Merci !" à travers la porte déjà à moitié fermée.

Elle passa un bon moment à parcourir les couloirs en rigolant à intervalles réguliers, s'arrêtant dès qu'elle voyait une forme bouger du coin de l'oeil, mais ne parvenant pas à localiser le fameux animal. Le temps passait, et il était de moins en moins rare de croiser des élèves, mais Juliet ne voulait pas arrêter ses recherches, même pour manger. Déjà, parce que la traque (amicale, bien sûr) d'une créature magique prenait le pas sur à peu près tout, et puis aussi parce que même si elle en était très fière, d'avoir été choisie comme une amie des Muttiluttiplouc, elle ne voulait toujours pas que Wendy la voie avec des verrues sur la figure.

Elle finit cependant par se rendre compte qu'elle n'aurait pas beaucoup de chance de trouver cette créature toute seule, surtout qu'elle ne savait pas à quoi elle ressemblait. Elle repéra alors un garçon qui passait là, qui semblait avoir à peu près son âge. Peut-être qu'il accepterait de l'aider ! Et, peut-être aussi qu'elle se ferait un ami de plus en cherchant une créature amie ! Il avait l'air gentil, après tout, ce garçon. Quelle journée formidable ça allait être ! Elle apostropha le garçon.

"Eh, salut ! Est-ce que tu sais à quoi ça ressemble un Muttiluttiplouc ? J'en cherche un, il est gentil, il m'a fait ça au visage comme témoignage d'amitié. Et j'aime bien avoir de nouveaux amis. Toi tu aimes te faire des amis ? Au fait, moi, je m'appelle Juliet. Et toi ?" Elle fit un grand sourire à l'inconnu. En plus, elle s'était arrêtée en plein milieu du couloir savonette, qui était très joli avec toutes ses bulles et, en plus, ça sentait bon.

Le garçon n'avait pas l'air aussi émerveillé qu'elle devant le témoignage d'amitié de la créature mystérieuse. C'était étrange. Mais il était gentil, Juliet pouvait apprécier ça, il lui avait pris les mains et il semblait vraiment concerné par son léger problème facial. Il ne devait pas bien comprendre, ça devait être ça. Après tout, nombreux étaient les élèves de Poudlard qui ignoraient tout ou presque des créatures magiques : le cours était une option, et seulement à partir de la troisième année. Et puis, même en suivant le cours assidument, Juliet n'avait jamais entendu parler de cette créature-là en particulier avant ce matin-là.

"Oh non, ce n'est pas un sort ! C'est un muttiluttiplouc. C'est quelqu'un dans la salle commune qui me l'a dit." Dit-elle avec un grand sourire. "Et puis, tu sais, les animaux ont souvent des façons bizarres de montrer leur affection. Regarde, euh… Les chiens ! Ils te couvrent de bave, c'est un peu dégoûtant aussi, mais c'est mignon quand même, parce qu'ils te montrent qu'ils t'aiment bien. Là c'est pareil !"

Elle fut très perplexe de ce que lui dit le garçon ensuite. Les créatures magiques, dangereuses ? Mais pas du tout ! Elle qui avait recueilli un bébé acromantula était bien placée pour savoir que quand on fait attention et, surtout, qu'on respecte la créature magique à laquelle on a affaire, on ne risque rien. Enfin, presque rien. Elle eut un petit gloussement.

"Oh, mais non voyons ! Les créatures magiques sont très sensibles en général, mais elles ne sont pas méchantes ! La plupart sont comme les animaux moldus, il faut juste savoir être prudent. Et puis je ne suis pas allergique, donc tout va bien !" Elle sourit à nouveau puis ajouta : "En plus, même si je l'avais été, ce n'est pas sa faute, à cette pauvre bête, elle ne pouvait pas savoir. Je crois que cette créature a une culture propre, qui passe par des sortes de rituels, c'est passionnant, non ? Ca veut dire qu'elle a une intelligence humaine, ou presque ! Un peu comme les acromantulas peut-être."

Elle faisait vraiment de son mieux pour passionner le garçon à sa quête, mais elle avait un peu l'impression de ne pas y arriver. Elle ne comprenait pas sa réaction. Elle allait bien, il n'y avait pas de raison de s'en faire ni d'aller à l'infirmerie ! Il n'aimait pas les animaux ? Ses parents non plus n'aimaient pas trop ça, et elle n'avait pas très envie de voir leur tête l'été prochain quand elle leur rapporterait Viviane et Morgane, ses deux chouettes. Elles étaient pourtant si mignonnes ! Si gentilles, et affectueuses, chacune avec sa personnalité ! Elle avait pris l'habitude de leur donner des gâteaux secs le matin au petit-déjeuner et du coup, elles venaient tous les matins, courrier ou non, lui manger dans la main.

"Pourquoi tu n'aimes pas les animaux ? Ils sont comme nous tu sais, ils ont juste envie qu'on les aime."

Il disait des choses bizarre ce garçon. Il lui demandait si elle croyait tout ce qu'on lui disait dans la salle commune. Mais oui ! Si on ne pouvait plus faire confiance à ses aînés, où allait le monde ? Enfin, aîné ou non, Juliet faisait confiance à tout le monde, elle allait où on lui disait et posait des questions deux heures plus tard, si elle le faisait, ce qui n'était pas toujours le cas. Elle avait été très contente quand on lui avait dit que c'était une créature magique tout à l'heure, et pas seulement parce que ça voulait dire qu'une créature magique l'avait choisie comme amie, mais aussi parce que ça signifiait que, pendant quelques secondes, le grand qui lui avait dit ça s'était soucié de sa petite vie, et c'était la première pierre de l'amitié, ça. Et Juliet, elle aimait se faire de nouveaux amis. Beaucoup beaucoup.

Et même ce garçon-là, qui lui disait des choses bizarres, elle l'aimait bien. Il avait l'air d'être très concerné par son bien-être, il avait un grand coeur, et ça elle savait l'apprécier.

"Ben, pourquoi ils auraient voulu me faire tourner en bourrique ?" fit-elle, les yeux grands ouverts et un sourire sur le visage. "Et puis tu sais, je suis à Poufsouffle moi. Tout le monde est gentil à Poufsouffle. Même si je suis sûre que tout le monde est gentil à Serpentard aussi, hein," elle ne voulait pas le vexer, "comme toi, tu es très gentil, tu veux m'aider et tout."

Il lui demanda aussi si elle avait eu la varicelle. Hm… Elle ne se souvenait pas… Ah, si, c'était pas la maladie avec tous les boutons, qu'elle avait attrapée quand sa soeur l'avait eue ?

"Oui, je l'ai déjà eue la varicelle ! Et j'ai même eu la varicelle du dragon aussi," ajouta-t-elle, très fière d'avoir eu une maladie magique. "C'était un peu pareil, en fait. Sauf que l'infirmier s'est trompé de potion et j'étais toute déprimée après, ça c'était très bizarre. Mais je me suis fait un nouvel ami du coup !" Et ça, ça valait toujours le coup.

Juliet l'écouta parler des animaux et de tout ce qu'il fallait ou non leur permettre. Tiens. Elle n'avait jamais réfléchi comme ça, les animaux elle leur passait tout, avec toujours un air attendri sur le visage. Est-ce qu'elle était trop laxiste avec eux ? Si un chien la mordait très fort, est-ce qu'elle le laisserait faire ? Maintenant qu'elle y pensait, oui, sûrement. Elle se dirait sûrement que c'était sa faute, qu'elle avait du avoir menacé son territoire ou quelque chose comme ça. Mais Juliet était capable de se remettre en question, elle ne se croyait pas plus intelligente que tout le monde à avoir toujours raison. Et puis, elle voulait avoir une ferme à hippogriffes plus tard, il faudrait sûrement qu'elle apprenne à être plus ferme et à imposer sa volonté aussi. Oui, sur ce coup-là, le garçon avait sûrement raison.

"C'est vrai…" dit-elle. "Je n'y avais pas pensé comme ça. C'est vrai que dès qu'il est question d'animaux je laisse tout passer, hihi, mais tu as raison, il faut que je fasse plus attention." Elle prit encore quelques secondes pour réfléchir. "Et c'est vrai que ça ne m'enchante pas d'être toute défigurée, en fait. Mais là ça va, j'ai mal nul part, tout va bien ! Je suis trop curieuse de voir la créature qui m'a fait ça pour lui en tenir rigueur, tu comprends ?" dit-elle avec un grand sourire.

Et puis, il dit encore quelque chose que Juliet n'avait jamais entendu dans la bouche d'un sorcier. La magie ça fait du mal ? Mais… Comment ça ? Bien sûr, elle entendait parler en cours de Défense Contre Les Forces Du Mal de ce genre de choses, mais c'était la mauvaise utilisation de la magie qui faisait ça. La magie en elle-même n'était pas mauvaise, ne faisait pas de mal. Juliet était toujours tellement impressionnée par tout ce qui était magie, rien que se promener dans le château lui mettait des étoiles dans les yeux, alors elle ne comprenait vraiment pas une telle position.

"Mais… La magie n'est pas mauvaise ! La magie, c'est merveilleux, c'est comme dans les contes, c'est… magique ! Pourquoi tu n'aimes pas ça ?"

Ne pas faire confiance à n'importe qui ? Se faire avoir ? Oui, bien sûr, il y avait des gens méchants qui faisaient du mal, mais pas à Poudlard. Les gens étaient gentils à Poudlard, et même s'ils y en avait des méchants, ils ne pouvaient rien faire, parce que sinon ils feraient perdre des points à leur maison et ils iraient en retenue. C'était pour ça qu'il y avait des professeurs à Poudlard, même la nuit. Pour veiller à ce que tout se passe bien. Or, le garçon qui lui avait dit qu'elle avait été attaquée par un Muttiluttiplouc n'avait pas du tout l'air inquiété de perdre des points ou d'aller en retenue, alors il ne pouvait pas avoir menti, c'était aussi simple que ça.

"Oh, si, elle me le dit souvent ma maman !" Répondit-elle. "Mais elle se trompe. Elle me dit aussi de ne pas parler au monsieur l'éboueur qui passe le matin, mais il est très gentil en fait, c'est mon ami. Il a quatre enfants et il joue de la guitare. J'ai voulu l'inviter à mon anniversaire quand j'avais neuf ans, mais mes parents n'ont pas voulu. Alors des fois, même les adultes ils se trompent. Tu crois qu'ils se sont trompés aussi, les grands qui m'ont dit que j'avais été piquée par une créature ?"

Ca, c'était possible par contre. Ca la décevrait beaucoup, certes, mais c'était possible. Après tout, les piqûres de cette créature ressemblaient beaucoup à des boutons normaux, peut-être qu'il y avait une explication beaucoup moins agréable qu'une créature fantastique. Comme, un moustique par exemple. Un gros, gros moustique tout velu, brrr. Mais bon, c'était ça ou une créature très intéressante, alors Juliet préférait croire à la créature. Elle était comme ça, Juliet.

La chose que dit le garçon ensuite la fit tout bonnement éclater de rire.

"Mais bien sûr que t'es gentil ! Pourquoi tu ne serais pas gentil ? Tu me parles bien, non ? On n'aurait pas une discussion aussi agréable si tu n'étais pas gentil."

Mais il insistait, il voulait qu'elle l'abandonne, sa créature magique. Et… Il n'aimait pas la magie ? Comment ça ? C'était possible ? Mais c'était merveilleux la magie ! Ca, elle ne pouvait vraiment pas comprendre, ça lui passait carrément au-dessus de la tête. Depuis le moment où elle avait découvert qu'elle était une sorcière, la magie n'avait fait que l'émerveiller un peu plus chaque jours, amener de la fantaisie dans une vie toute bien rangée. La magie lui avait fait rencontrer Wendy. Grâce à la magie, elle avait des animaux magnifiques qu'elle adorait.

"Mais… Comment tu peux ne pas aimer la magie ? Tu ne lisais pas de contes quand tu étais petit ? Ca ne te plaît pas de voir que tout peut arriver, que tant de choses sont possibles ? Ce n'est pas la magie qui fait du mal aux autres ! Ce sont les gens méchants. Les gens méchants, ils sont méchants, qu'ils soient moldus ou sorciers."

Après réflexion, c'était vraiment incompréhensible, mais très original, tout ça. On ne pouvait pas dire que ce garçon était banal, pour le coup. Alors Juliet, pleine de bonne volonté, se dit que, pourquoi pas. Ca pouvait être intéressant d'entendre son point de vue, même si elle était certaine de ne pas le partager.

"Pourquoi tu n'aimes pas la magie ?" Demanda-t-elle, honnêtement curieuse.

Le garçon avait l'air un peu fâché, c'était peut-être pour ça qu'il disait tant de choses bizarres. Elle, mourir ? Voilà qui était drôle ! Elle avait seulement 13 ans Juliet, elle ne mourrait pas encore avant… avant… Elle n'était pas très bonne en maths, mais avant longtemps, quoi. Enfin bien sûr il y avait toujours des accidents, mais quelles étaient les chances que ça lui arrive à elle ? Et elle ne prenait pas de risques inutiles non plus. Elle était sage, comme petite fille. Et puis la notion de mourir "égoïstement" lui passait complètement au-dessus de la tête. On ne pouvait pas vouloir mourir, alors comment mourir pouvait être égoïste ? Vraiment, il disait beaucoup de choses qu'elle ne comprenait pas. Encore plus que les grands qu'elle avait rencontrés, et pourtant, il ne devait pas être plus âgé qu'elle. Juliet, perplexe, fronça les sourcils. Voilà qui était étrange.

Et puis, elle dit la mauvaise chose, apparemment, parce que tout à coup elle eut une douleur fulgurante dans la joue. Elle porta sa main à son visage, choquée. Frappée ! Il l'avait frappée ! Mais qu'est-ce qu'elle avait fait ? Elle était gentille Juliet pourtant ! Ils ne faisaient que discuter calmement ! Elle avait juste exprimé une curiosité toute honnête, tranquillement, et… C'était la toute première fois qu'elle se faisait taper, Juliet, et ça lui faisait vraiment bizarre. Elle n'était pas en colère. Juste très surprise.

Et puis Louis se remit à parler - ou plutôt, à crier. Il avait l'air vraiment en colère maintenant. Ca lui faisait un peu peur à Juliet. Mais surtout, elle écouta ce qu'il disait, et elle se sentit très triste. Tué ? Son frère avait été tué par la magie ? Mais comment était-ce possible ? La magie ne tuait pas ! C'était peut-être un accident. Peut-être qu'une boule de cristal lui était tombée sur la tête. Ou qu'il était tombé du dos d'un hippogriffe. En tout cas, Juliet n'en menait pas large. Elle se rendait compte maintenant que tout ce qu'elle avait dit n'avait sûrement fait que remuer le couteau dans la plaie du pauvre garçon. Elle était toute contrite. Elle s'approcha de nouveau du garçon, lentement, comme si elle craignait une autre baffe bien sentie.

"Euh… Je suis désolée… Je ne savait pas… euh…"

Elle ne savait vraiment pas quoi dire. Elle était honnêtement désolée pour le garçon, il lui apparaissait soudainement si blessé, si en colère contre tout, qu'elle fit quelque chose qu'elle ne faisait jamais. Elle le prit dans ses bras. Elle voulait lui dire que tout irait mieux et que le monde était joli et que les oiseaux chantaient et tout un tas de trucs comme ça, mais bizarrement les mots ne sortaient pas. C'était tellement triste. Elle n'était pas très proche de son frère et de sa soeur, mais elle savait quand même que si il leur arrivait quelque chose, elle ne pourrait jamais s'arrêter de pleurer. Et pourtant, c'était de Juliet, little miss sunshine, qu'on parlait. Il n'aimait pas la magie. Soit. Elle n'était pas d'accord mais elle comprenait. Elle ne lui parlerait plus de magie. Elle n'insisterait plus pour trouver la créature magique.

"Tu veux bien m'accompagner à l'infirmerie ?"

Juliet était tout bonnement incapable de voir quelqu'un triste sans ressentir d'empathie. C'était évident, maintenant. Ginkgo, Wendy, dès qu'il y avait des gens malheureux, Juliet avait le câlin facile. Alors c'est tout naturellement qu'elle prit le garçon dans ses bras. Elle lui avait parlé avec toute sa candeur, tout son émerveillement pour la magie et maintenant elle regrettait un peu. Elle avait peur de l'avoir blessé. En tous cas, ce n'était peut-être pas sa faute, mais il était blessé : il pleurait. Le pauvre. Si seulement elle avait su, pour son frère, elle n'aurait pas dit toutes ces choses sur la magie et les créatures.

Et puis, il se mit à pleurer. Et Juliet se dit que c'était bien. Souvent, c'était de ça qu'on avait le plus besoin, pour aller mieux, de pleurer un bon coup pour évacuer toutes les petites frustrations de la journée. C'était rassurant, de pleurer. Le garçon, lui, avait l'air d'en avoir un peu honte : il ne voulait pas que Juliet en parle. Immédiatement, Juliet acquiesça contre son épaule. Elle devenait douée pour garder des secrets ces derniers temps. Le fait qu'elle était amoureuse de Wendy, le fait qu'elle était devenue animagus, elle pouvait tout à fait en ajouter un troisième à la liste.

Juliet, elle l'aimait bien ce garçon. Elle était sûre, malgré tout ce qu'il disait, qu'il était très gentil, et que c'était quelqu'un de bien avec qui elle adorerait être amie. Depuis le début il n'avait fait qu'essayer de lui ouvrir les yeux sur ce qu'il considérait comme un grand danger. S'il n'était pas gentil, pourquoi aurait-il fait ça ? Il aurait juste passé son chemin. Mais non. Il avait essayé de l'aider, jusqu'à lui crier dessus pour la faire réagir. Et en plus, voilà qu'il s'excusait. Elle ne lui en voulait pas, Juliet, de toutes façons.

"C'est pas grave," lui dit-elle avec un sourire dans la voix.

Et puis, elle avait retenu sa leçon. Si elle voulait être son amie, ne plus parler de magie. Ca allait être difficile puisqu'ils étaient dans un couloir magique du château magique qui leur tenait lieu d'école de magie (elle devait être dure, sa vie, au garçon), mais elle allait essayer. Il s'écarta d'elle et passa sa manche sur ses yeux pour essuyer ses larmes. Juliet le regardait avec un grand sourire candide. Il voulait bien l'accompagner ! Elle ne remarqua même pas qu'il n'avait toujours pas l'air très heureux d'être avec elle.

"Au fait, je m'appelle Juliet. Et toi, c'est quoi ton nom ?" Demanda-t-elle.

Elle commença à marcher vers l'infirmerie et vit avec plaisir qu'il la suivait.

"Tu viens d'où, toi ? Moi je suis de Liverpool. C'est bien, il y a la mer à côté, et on a un cinéma juste en face de la maison, à deux pas, alors j'y vais souvent avec mon frère et ma soeur, quand mes parents veulent bien."

Elle avait comprit la chanson. Muggle stories only.

Le garçon s'appelait Louis. C'était joli comme prénom, Louis. Ca faisait exotique. Est-ce qu'il était anglais d'origine ? Peut-être qu'il venait de loin, en fait ! D'un pays lointain avec des mystères et des tas de choses à découvrir et des nourritures étranges à essayer… Juliet n'était jamais allée à l'étranger, et elle avait hâte de visiter le monde entier.

"Moi je suis en troisième année," dit-elle avec un sourire.

Mais bien vite elle se rendit compte que malgré son prénom original, Louis ne venait pas de si loin. Cornouaille. Cornouaille. C'était où ça ? Ah, dans le sud-ouest. Elle était vraiment nulle en géographie, et trois années à Poudlard, dans le monde de la magie où, grâce à la poudre de cheminette, les distances n'avaient plus aucun sens,

"Je ne sais pas trop où est Poudlard, je crois qu'on est en Ecosse, mais personne ne sait où exactement. Alors, je ne sais pas si c'est loin de chez moi. C'est à l'ouest Liverpool. Pour aller à Poudlard, je prends le train jusqu'à Londres, c'est un peu long mais j'y vais avec ma meilleure amie, Wendy, elle habite à Liverpool aussi, alors ça passe vite. On discute et on fait des jeux et tout. C'est très marrant. Tout le monde est gentil chez moi aussi ! Tu as des amis là-bas, en Cornouaille ?"

Juliet se rendait compte qu'elle avait choisi le bon sujet de conversation. Le maussade Louis était tout à coup tout rêveur, tout gentil, content de parler de chez lui. A Juliet aussi, en fait, ça lui plaisait plutôt. C'était assez rare de parler du monde des moldus à Poudlard. La plupart des élèves préféraient très nettement le monde des sorciers, et du coup, ils n'étaient pas très intéressés par ses histoires moldues. C'est vrai aussi que Juliet, fascinée par la magie, ne cherchait pas vraiment à aborder le sujet. Mais elle s'apercevait là, maintenant, que ça lui faisait du bien, de parler de chez elle. Ca lui rappelait toutes les choses qu'elle faisait avec Wendy pendant l'été. Même si mentionner sa famille ne lui faisait que ressentir encore plus profondément que sa véritable famille, celle dont elle était la plus proche, elle était ici, avec elle. Sa vraie famille, c'était Wendy.

"Oui, j'ai un frère qui s'appelle Jonas, et une soeur qui s'appelle Ellen. Ils sont moldus. Mais ils sont tous les deux grands, on n'est pas très proches, du coup, ça les embête quand je leur demande si je peux jouer avec eux." Juliet n'aimait pas non plus énormément le sujet de sa fratrie. Et puis il mentionna une petite soeur, à gryffondor, en première année… Et tout à coup Juliet se rappela qu'elle avait déjà entendu l'étrange prénom de Louis quelque part. "Mais oui !" S'écria-t-elle soudainement, toute contente. "Tu es le frère d'Ocean ! Je la connais Ocean, c'est mon amie ! Elle est très gentille et toute mignonne, tu as vraiment de la chance qu'elle soit ta soeur. Et puis ne t'en fais pas pour elle, tu sais, moi aussi j'adore la magie et les créature et il ne m'est jamais rien arrivé !" Bon, ce commentaire aurait sûrement mieux marché si elle ne l'avait pas fait alors que son visage était recouvert de pustules affreux.

Juliet n'en croyait pas sa chance, elle avait enfin rencontré le fameux Louis ! Ocean en parlait tout le temps, ce n'était pas étonnant qu'il soit aussi gentil.

"Elle t'admire beaucoup ta soeur, tu sais," fit remarquer Juliet. "Je le savais bien que tu étais gentil !"

Ca lui faisait un peu bizarre, à Juliet, de parler géographie tout à coup. La localisation des choses semblait si peu importante dans le monde de la magie où on pouvait aller n'importe où d'un claquement de doigt. Même en été, elle vivait juste à côté de chez Wendy dont la maison magique contenait une cheminée reliée au réseau de poudre de cheminette, alors, sous couvert de passer la journée chez son amie, elle allait parfois faire des escapades à l'autre bout du pays, au Chemin de Traverse par exemple. Mais Louis venait d'une famille de Moldus, alors elle espérait que la Cornouaille ne se tienne pas trop distante de Liverpool, comme ça, elle pourrait rendre visite à son nouvel ami pendant l'été, s'il voulait bien. Ca lui ferait du bien aussi, à Juliet, de faire des choses de moldus un peu. Et elle pensait bien que Louis aimerait beaucoup Wendy – tout le monde aimait beaucoup Wendy, normal, pour une fille aussi géniale – et que Wendy le lui rendrait bien, alors ils pourraient bien s'amuser tous les trois !

Louis lui parlait de ses amis maintenant. Quel dommage qu'il ne les voie plus ! Mais en même temps, Juliet comprenait. Les rares amis qu'elle possédait à son école moldue ne lui parlaient plus vraiment quand elle les croisait dans la rue en été. Il fallait dire que quand on passait toute l'année dans un internat magique que l'on ne doit pas mentionner aux moldus, ça n'aidait pas à discuter librement avec les vieux amis. Mais ça ne l'embêtait pas trop, Juliet. Il lui restait Wendy – il lui resterait toujours Wendy – et ça lui suffisait. Et puis maintenant qu'elle résidait à Poudlard, elle possédait plus d'amis que jamais, des amis qui ne la trouvaient pas (trop) bizarre, qui l'aimaient pour elle-même. A Liverpool, à part avec Wendy, elle restait pour tout le monde la petite sœur d'Ellen et Jonas, mais moins intelligente, moins débrouillarde, qui souriait trop et ne pensait pas assez.

Juliet adorerait avoir une petite sœur comme Ocean, adorable, gentille, émerveillée par les miracles que faisaient la magie tous les jours… Alors elle ne comprenait pas vraiment pourquoi la pensée de sa sœur renfrognait Louis comme ça. Elle ne trouvait pas ça très gentil, de lui dire qu'il la trouvait bête. Elle n'aimait pas qu'on la dise bête, Juliet, ça lui rappelait trop ce que ses parents lui reprochaient souvent, et qu'elle n'arrivait pas vraiment à nier.

"Tu sais, on peut ne pas penser comme toi sans que tu nous trouve bête. Regarde, moi je ne te dis pas bête, si ?" Juliet parlait avec un grand sourire, loin d'elle l'idée de faire la morale à Louis, elle ne disait que ce qu'elle pensait, sans vraiment réfléchir, comme à son habitude. "On ne lui fait pas peur facilement à Ocean, mais je trouve ça bien, ça veut dire qu'elle peut apprécier la vie sans s'inquiéter toujours de ce qui pourrait arriver. Et puis, heureusement qu'elle n'écoute pas tout ce que tu dis ! Tu t'ennuierais sinon, si ta petite sœur faisait comme un robot qui t'obéit tout le temps. Mais je trouve ça gentil que tu veuilles protéger ta sœur. Moi aussi je ferais ça si je devenais grande sœur."

[HRP : Désolée, défi du préfet fayot oblige, c'est pas génial… Je me rattraperai la prochaine fois !]