Kelsey aimait beaucoup le théâtre, bien qu'elle n'y aille pas souvent. Déjà parce que c'était plutôt loin de chez elle, et ensuite parce que ses parents avaient d'autres choses à faire que l'y emmener. Elle avait hâte de voir la mise en scène de La Conquête d'une Vélane, ça promettait d'être romantique, et peut-être drôle qui sait ?

Wesley lui avait souvent parlé de cette fête, la St-Valentin, mais elle avait complètement oublié que c'était aujourd'hui. Elle trouvait que cette fête était plutôt sympathique, vu qu'il n'y avait pas vraiment d'équivalent dans le monde magique, et que c'était une bonne occasion de s'empiffrer de chocolats, qu'on soit en couple ou célibataire. Bon évidemment, Wesley n'était plus célibataire, donc il était hors de question qu'il rejoigne le club des PDA qui restaient encore seuls cette année — à savoir... Bah, Garfield et elle vu que Sloan avait quand même réussie à se trouver quelqu'un. S'il n'y avait pas eu de sortie, elle lui aurait proposé de se retrouver au club à manger des tonnes et des tonnes de chocolat à papoter pour ne pas se sentir seul cette année, mais bon, les professeurs en avaient décidé autrement !

Kelsey ne fit pas vraiment attention à où elle s'assit, elle voulait juste être bien installée. Elle était trop occupée à regarder la décoration de la salle et à essayer de repérer où étaient assis ses amis, puis à lire le programme pour voir quand serait l'entracte pour les pauses pipi et surtout le résumé de la pièce. Quand elle entendit le chariot à pâtisserie, elle tourna la tête et qu'elle ne fut pas sa surprise en reconnaissant cette tignasse blonde. Elle hoqueta, indignée.

« Mais je te reconnais toi ! T'es le pervers exhibitionniste de la dernière fois... Comment c'est déjà ton nom... Tom Sawyer ! Non attend... Remi ! Non... »

Il avait un nom d'orphelin de dessin animé moldu, mais alors pour se rappeler lequel... Toujours est-il que franchement, il n'aurait pas pu choisir un autre endroit où s'asseoir ? Maintenant elle allait stresser à chaque fois qu'il bougeait, comme s'il était un pervers aux aguets.

Kelsey fusilla le Poufsouffle du regard en croisant les bras d'un air fort peu convaincu. Elle fit balancer une de ses couettes derrière son épaule d'un geste dédaigneux et dramatique juste pour insister sur le fait qu'elle le boudait.

« Un Cracbadaboum arrive rarement par un concours de circonstance... On ne lance pas un sort qu'on n'est pas sûr de réussir ! Je fais même pas de magie et même moi je le sais ! »

Elle n'était franchement pas prête de lui pardonner, parce que la vue qu'elle avait eu avait été traumatisante, et ensuite parce qu'il a fallut qu'il lance un tel sort à la seule personne de cette école qui ne pouvait pas réparer ses vêtements !

Kelsey était peut-être un peu naïve, mais pas dupe. Un pervers restait un pervers, et elle était particulièrement rancunière. Si elle avait quelqu'un dans le collimateur, cette personne ne pouvait plus respirer sans commettre un crime contre l'humanité. Elle le fusilla du regard quand il s'excusa, parce que son excuse était quand même assez pitoyable. "Pardon, j'étais à cours d'idée, donc c'était plus simple de te déshabiller ! Et moi aussi au passage !" , mais bien sûr !

Elle n'eut même pas le temps de répondre quand il voulu lui acheter quelque chose que le blond se leva en se précipitant vers le chariot. Il la déshabille et maintenant il voulait la faire grossir ?! Ah vraiment, de mieux en mieux, et la prochaine étape c'est quoi, lui refiler la varicelle du dragon soit disant parce que si elle l'attrape plus vieille elle risquait de mourir ?!

Kelsey observa le paquet avec méfiance quand il se rassit à côté d'elle, l'air bougon, mais bon, pourquoi pas après tout, on ne regardait pas un film moldu sans pop-corn comme on ne regardait pas une pièce de théâtre sans une petite douceur avant.

« Mouais... D'accord... Mais plus jamais, plus JA-MAIS je ne ferai de duel avec toi, c'est clair ? »

Sur ce, elle mâcha le petit croissant aux amandes avec une moue bougon jusqu'à la dernière miette et tapota dans ses mains pour se débarrasser du sucre glace.

« C'était pas mauvais. C'était même très... bon ? »

Elle se mit à le regarder un peu différemment, comme si tout à coup il avait un espèce d'aura qui le rendait mille fois plus attirant. Comme si s'il se décidait à lancer un nouveau Cracbadaboum, elle ne serait plus gênée. Elle se sentait bien, là, avec lui, plus à l'aise qu'avec n'importe qui, malgré son coeur qui battait fort dans sa poitrine. Elle sourit avec un air angélique.

« Okay, c'est décidé, j'te pardonne, parce que t'es trop mignon ! »

Puis elle passa ses bras autour du coup pour un "câlin de pardon" en le serrant fort fort contre elle. Pourquoi elle était en colère contre lui déjà ? Comment est-ce qu'on pouvait s'énerver contre un garçon aussi mignon qui n'avait fait qu'obéir à son instinct ? Le pauvre chéri. Et voilà, un petit bisou sur la joue pour le pauvre garçon. Puis un autre, et encore un autre...

Kelsey sentit comme des papillons dans le ventre quand Oliver lui rendit son étreinte, et son coeur se mit à battre la chamade. Alors il l'aimait aussi ! Oui car sinon pourquoi est-ce qu'il lui ferait un câlin de la sorte ? En fait, Oliver l'aimait sûrement depuis le tout début, depuis ce duel entre magie et pistolet à eau. Forcément, ce genre de chose crée des liens. Et même que c'est pour ça qu'il a essayé de la faire rire — de force — et de la déshabiller. Chacun sa façon de déclarer sa flamme ! Qui était-elle pour juger ?

Elle fut un peu surprise qu'Oliver se dégage de son emprise et le regarda avec des yeux ronds. Avait-elle fait quelque chose de mal ? Ce n'était qu'un câlin et quelques bises sur la joue.

« Bizarre, mais non pas du tout !! Enfin... »

Et bien, maintenant qu'elle y pensait, peut-être oui, peut-être qu'elle était bizarre. C'est vrai qu'elle ne s'était jamais sentie comme ça avec quelqu'un, à la fois aussi détendue comme si elle avait trouvé sa vraie place, et en même tant si anxieuse à l'idée qu'il la rejette comme il commençait à le faire en ce moment même... Non, elle devait y faire quelque chose. Baissant légèrement les yeux en rougissant, elle s'éclaircit la gorge.

« ... Maintenant que tu le dis... Peut-être que... Enfin... J'ai le coeur qui cogne très fort dans ma poitrine, j'ai très chaud, et être à côté de toi comme ça c'est... Ca me donne des papillons dans le ventre, c'est très bizarre... M-Mais pas désagréable hein ! C'est juste... »

Nouveau, inédit. Mais ça ne pouvait être que ça n'est-ce pas ? Ca ne pouvait être que l'amour ? Elle rougit encore plus à ça et passa encore une fois ses bras autour du cou d'Oliver, en rentrant le ventre parce que l'accoudoir entre eux commençait par lui faire mal — mais ça valait le coup de souffrir pour être plus près de son cher et tendre.

« Je crois que... oui... Je crois que je suis amoureuse de toi. »

Kelsey déglutit péniblement. Voilà, c'était dit, avec les yeux les plus expressifs du monde, une moue timide qui promettait de devenir triste si jamais ses sentiments n'étaient pas réciproque.

« Et... Et toi ? Est-ce que tu m'aimes ? Tu sais si... Si t'es un pervers, c'est pas grave, je peux faire avec... Tant que c'est pas trop embarrassant... »

Elle avait parlé à voix basse, parce que c'était déjà embarrassant.

Pour le coup, ça n'était vraiment pas ce à quoi elle s'attendait après s'être confessée. Elle prit une moue un peu boudeuse avec ses yeux de chiens battus, mais desserra son étreinte un peu plus pour le laisser respirer. Peut-être disait-il juste ça parce qu'il était nerveux ? Oui, c'était sûrement ça.

« Désolée... »

Elle se sentait un peu coupable d'avoir étranglé son cher et tendre, mais elle voulu lui répondre que ça ne répondait pas à sa question. Il l'avait ignoré en répondant à côté de la plaque, il ne semblait même pas vraiment gêné, il ne souriait même pas comme s'il était content qu'elle lui ait dit qu'elle l'aimait.

Ou peut-être qu'il n'avait pas entendu ? Est-ce qu'elle devait le lui répéter ? Kelsey s'apprêtait à lui refaire une déclaration quand il posa une main sur son front, ce qui eut le don de la faire rougir encore plus. Comme c'était touchant ! Il s'inquiétait pour elle ! C'est qu'elle en pleurerait presque de joie. Il y avait si peu de gens qui se faisaient du soucis pour sa santé, soit disant parce qu'elle était limite hypocondriaque.

« N-Non, je vais bien ! C'est gentil de te faire du soucis ! Mais je... Je veux continuer à regarder la pièce de théâtre. Avec toi. Enfin... Si tu veux bien...»

Voilà qu'elle redevenait timide maintenant, c'est qu'il ne semblait pas aimer le contact, en tout cas pas ses câlins remplis d'amour et de tendresse, alors qu'elle n'était plus trop sûre de ce qu'elle pouvait faire ou pas, la pauvre enfant.