Le premier match de Quidditch que Peony ait joué de toute sa vie l'avait imprégné d'un profond traumatisme.
Avant de se lancer, il avait bien sûr imaginé tous les dangers que cela représentait : un bras cassé par un cognard, une petite fracture de la cheville, gober un vif d'or, manger de l'herbe, éternuer de la poussière de fée. Mais bon, il l'aimait bien le Quidditch, alors les risques n'étaient pas si graves. Par contre, oui, par contre ! Si on lui avait annoncé qu'il finirait chauve, jamais il n'aurait mis les pieds sur le stade. Jamais jamais.
Bon, d'accord, c'était temporaire. Mais quand même. Son premier réflexe, lorsqu'il put rejoindre le plancher des vaches, fut de chercher Kelsey, l'étouffer dans ses bras en chouinant et en l'implorant d'inventer une lotion miracle capable de faire repousser n'importe quelle chevelure. Ou de le tuer, c'était bien aussi. En plus, être tout vieux et tout rabougri ça rendait les idées noires, et ça y faisait penser, à la mort.

Tout en noyant ses épaules de morve, il s'était surpris à imaginer son amie trépasser. Comme ça. Toute vieille, les cheveux blancs, des rides jusqu'aux orteils. Elle aurait traversé la rue pour aller chercher du pain et une voiture l'aurait renversée. Ou un balai furieux, si jamais elle habitait dans un village sorcier. Alors, vieux lui aussi, il serait allé à son enterrement et aurait pleuré toutes les larmes de son corps. Il aurait fleuri sa tombe avec des pivoines, puis ce serait ennuyé tout le reste de sa vie de vieux ; parce que, honnêtement, il fallait l'admettre, Peony cherchait très souvent Kelsey lorsqu'il s'ennuyait.

La réflexion macabre avait alors été interrompue par la promesse de sa jeune amie de l'aider à réaliser sa prochaine teinture, pour le consoler, et rendre à ses cheveux leur splendeur d'antan. Ni une ni deux, le Serpentard avait retrouvé toute sa joie de vivre, et un peu de sa jeunesse aussi : la potion de vieillesse commençait à perdre de ses effets.

De là à comprendre pourquoi ils avaient choisi le soir d'Halloween pour s'occuper de la crinière de Peony, c'était une autre histoire. Peut-être parce que ça tombait durant le week-end et que c'était bien pratique. Peut-être juste parce qu'ils étaient un peu bêtes.
Kelsey préparait le produit, ou il ne savait trop quoi, parce qu'il s'y connaissait mieux en colorations magiques que moldues, Peony s'observa dans le miroir des toilettes désertées. Entre autre, il coiffa ses cheveux, s'assura que les pointes n'étaient pas trop abîmées, et constata qu'il perdait tout de même pas mal de cheveux.

- C'est le stress, commenta-t-il, l'air sérieux, sans regarder Kelsey. Entre Astrid qui me court dans tous le château pour me crier dessus, Eileen qui m'accuse de lui avoir volé son journal intime et Perseus qui me jette du vinaigre à la figure parce que je ne le rembourse pas, je stresse, et c'est mauvais pour le cuir chevelu. Il soupira et, appuyé au lavabo, cette fois, se tourna vers son ami. Même si j'étais mort sur le stade, Astrid aurait continué de me crier dessus. Un truc comme moi c'est inadmissible de mourir avant d'attraper le vif. Elle a autant de coeur qu'un cadavre de rat, cette fille.

Elle, elle s'en fichait bien de l'état des cheveux de Peony. Un jour, elle s'allierait à Perseus pour le noyer dans un grand seau de vinaigre, ou le raser de près. Et ce jour-là, oui, ce jour-là, il serait sans pitié.

- J'exagère ? Comment ça j'exagère ? râla gentiment Peony. Toi aussi tu l'as vu. Si elle pouvait se servir de moi comme tapis de salle de bain, elle le ferait. Un jour, se mettre à genoux n'sera plus suffisant pour satisfaire son égo.

Il gonfla un peu les joues mais, finalement, fut rapidement distrait par la boîte colorée que lui montrait Kelsey. Elle avait raison : sur papier, cette couleur était vachement sympathique. Le nom, un peu moins, mais franchement, ça le tentait bien. Malgré ses ascendances de sang-mêlé, il n'avait pas la moindre idée de ce à quoi ressemblait une teinture moldue, et pour cause, son père, aussi sympathique soit-li, n'était pas le genre d'homme à se teindre les cheveux. Alors, si la méthode le laissait un peu sceptique, la couleur le bottait bien, et il faisait confiance à son amie pour le tout.

- Si ça pouvait empoisonner Astrid ou le prof de botanique, ce serait cool. Mais t'as bien choisi, j'ai jamais teint en vert. J'espère que ça rendra bien.

Il écouta alors les explications de Kelsey sur l'usage du produit, non sans tiquer un peu à sa plaisanterie. Les cheveux, c'était tout le charme d'un homme ! Elle en connaissait, elle, des chanteurs et des acteurs chauves comme des oeufs de dragon, et adulés de tous ? Ils étaient quand même vachement moins nombreux que les célébrités parfaitement coiffées. Il ne fallait pas sous-estimer le pouvoir d'une chevelure parfaitement entretenue. Et, puis, décolorer... il était blond d'origine et, comme elle le soulignait, il avait assez souvent tartiné ses cheveux de coloration rose pâle ou de blanc pour qu'on n'y voit que du feu.

Malrgé tout, obéissant, Peony s'assit sur le carrelage des toilettes, comme ça, à même le sol. Son jean n'était pas assez épais pour protéger ses fesses du froid, mais tant pis, c'était pour la bonne cause. Debout, Kelsey serait incapable de teindre ses cheveux correctement, même sur la pointe des pieds, alors il fallait bien passer par là. Il attacha la petite cape blanche en question, puis se tourna vers Kelsey.

- Tu l'as déjà fait avant ? Enfin, au pire, si tu rates, je te pardonne parce que c'est toi, mais je préfère quand même savoir à quoi m'attendre.

Avec Kelsey, le Serpentard était beaucoup plus conciliant qu'avec n'importe qui. Mais, par sécurité, il alla quand même verrouiller la porte des toilettes avant de revenir s'asseoir. Déjà, pour ne pas êtres dérangés, même si ces toilettes étaient maintenant très peu utilisées. Ensuite, parce que si c'était raté, il voulait qu'ils aient le temps d'arranger un peu ça avant de se montrer en public.

L'esprit de Noël, hein ? Pour Peony, ce n'était pas la fête qui lui plaisait le plus. Bien sûr, c'était l'occasion pour la chorale de Poudlard de faire entendre sa voix à l'ensemble du château, mais à part ça, il n'y avait rien de spécial. Comme ses parents s'étaient séparés très tôt, il n'avait jamais vraiment passé de joyeux Noël en famille. Une année sur deux, il s'ennuyait comme un rat mort avec sa mère, qui leur cuisinait un gâteau infect, et l'année suivante, il retrouvait la famille de son père, autrement plus vivante, mais dépourvue de sorciers, et même si ce n'était pas un mal en soi, il y avait une sorte de manque. Ceci dit, l'idée des mèches était plutôt inspirante.

- Ma chevelure est tienne, tu es libre d'y faire ce que tu veux du moment que je ne finis pas chauve et que tu n'approches aucune paire de ciseaux.

Et sinon énoncé, il la laissa entamer les différentes étapes, appliquer le produit, le couvrir de papier aluminium et discuter de tout et de rien pendant l'opération. Comme Kelsey avait involontairement lancé le sujet, il évoqua les projets de la chorale pour les fêtes de fin d'année, et protesta contre le fait qu'ils répétaient toujours les mêmes chants. Puis, lorsqu'elle eut fini, Peony se releva et se regarda dans le miroir, touchant du bout du doigt ses mèches emballées.

- Ouais, non, je sors pas comme ça. On dirait que j'ai subis un sortilège bizarre. Comme j'ai pas de soeur et que ma mère est pas branchée beauté, j'avais jamais vu ce que ça donnait de laisser poser une teinture, mais c'est pas le comble de l'esthétique.

Et puis, comme le disait Kelsey, pouf. La lumière s'éteignit, comme ça, subitement. Ils auraient été dans le monde moldu, ça aurait sans doute été une bête panne de courant, mais en l’occurrence, oui, c'était censé fonctionner à la magie tout ça.
Peony chercha sa baguette dans sa poche, à tâtons. Il doutait que ça serve à quelque chose, mais il ne perdait rien à essayer.

- Ouais, je suis là. Lumos. Rien ne se passa. Rien de rien. Il soupira. Je sais que je suis un sorcier en carton mais quand même...

Dépité, il reglissa sa baguette dans sa poche après quelques essais supplémentaires, et décida de se laisser glisser le long du lavabo pour retrouver Kelsey. Il chercha du bout des doigts un bout de corps lui appartenant, et finit par tomber sur ce qui devait être son genou, plus ou moins.

- Ah, t'es là. Euh. P't'être que les toilettes sont trop vieilles et que tout a lâché ? On devrait essayer de trouver la porte et de d'ouvrir pour voir si il y a de la lumière dans le couloir ?

Pour le coup, il regrettait un peu, un tout petit peu d'avoir fermé et verrouillé la porte tout à l'heure.

Les mains de Kelsey sur son visage, puis sans ses cheveux enrubannés, le firent grogner un peu, davantage parce que la sensation d'être à demi-tâté, demi-frappé était désagréable que par réelle rancune. C''était Kelsey, c'était son amie, et la situation était un peu bizarre, alors son réflexe était assez légitime. Mais quand même, il avait été à deux cheveux de finir avec un doigt dans le nez ou dans l'oreille.

Bon, ceci dit, ses reproches hein, elle pouvait les garder.

- Eh, j'voulais être sûr qu'un truc géant et effrayant comme un épouvantard t'avait pas avalé en profitant de la pénombre. Il d'vient quoi notre futur duo si tu meurs ?

C'était quand même vachement important, leur futur duo. Ils feraient un carton, tout le monde les admirera. Leur nom sera sur toutes les lèvres. Et ils seraient riches, aussi. Pour s'acheter les teintures de la meilleur qualité qui soi, et des lampes efficaces, aussi.

Alors que Kelsey tentait, pas très efficacement, d'ouvrir la porte qui donnait sur le couloir, elle racnontait par la même occasion, une histoire d'horreur de sa connaissance. Comme si c'était le moment, franchement. Peony s'allongea sur le carrelage, fatigué d'avance.

- Kelsey, tais-toi. C'est ton histoire qui va nous faire stresser. Et puis si on est des persos principaux, logiquement on n'a rien à craindre. Les héros ça s'en sort toujours vivants nan ? Pis au pire.... Quitte à mourir autant que ce soit avec toi, au moins tu chantes bien et je t'apprécie.

Bon, d'accord, c'était pas le discours le plus rassurant du monde, mais c'était mieux que rien venant de quelqu'un qui avait pas mal de difficulté à s'adresser aux autres sans se montrer trop vexant. Il était d'ailleurs tellement gentil ce soir qu'il acceptait de répondre à sa requête.
Il se releva pour aller voir les cabines, mais se cogna la tête sur les lavabos, et lâcha un "aïe" sonore ; et rassura aussitôt Kelsey avant qu'elle pense qu'on l'égorge.

- J'vais bien, j'vais bien... Ouais, les cabines donc.

Il avança à tâtons jusqu'à trouver une des portes et la poussa. Ele grinça, mais rien ne lui sauta à la gorge.Il tenta une seconde, une troisième....

- Kelsey, j'dois vraiment toutes les faire ? J'y vois rien, ça sers pas trop à gr-...

Derrière lui, une cabine plus loin, la chasse d'eau avait été tirée. Peony leva les yeux au ciel et soupira.

- Kelsey, c'était pas drôle. Si tu veux aller aux toilettes tu me préviens avant, merci. J'ai pas autant la frousse que toi mais y'a des limites.

Ceci dit, quand est-ce que Kelsey s'étati déplacée ?

Peony n'était pas très certain de comprendre ce que Kelesy tentait de lui chanter. Elle parlait d'amour et de sentiments niaiseux, mais en pratique, à l'heure actuelle, ils étaient surtout piégés dans des toilettes abandonnés, un soir d'Halloween : si elle trouvait quoi que ce soit de romantique là-dedans, il allait falloir le lui expliquer de façon un peu plus claire que ça. Puis bon, c'était pas que pour un petit frère, il était plus grand qu'elle, mais quand même que si. Il pouvait manger sur sa tête. Peut-être même rédiger ses devoirs au sommet de son cuir chevelu, avec un peu de gymnastique du poignet.
Mais bon, puisqu'elle évoquait encore son roman, c'était sûrement que ses lectures lui montaient trop à la tête. Il aimait beaucoup Kelsey hein, mais clairement, la littérature ça siphonne le cerveau de certaines filles.

Enfin, disserter sur tout ça, ça résolvait clairement pas le mystère de la chasse d'eau. Peony referma la porte de la cabine qu'il venait de visiter et s'y adossa, au bruit du papier aluminium dans ses cheveux. Il poussa un soupir.

- C'est bon Kelsey, je vais pas me moquer de toi parce que tu vas faire pipi, c'est ok, t'es un être humain et je te connais bien, t'as pas besoin de mentir comme ça pour te cacher, c'est pas drôle.

Est-ce qu'il devait lui rafraîchir la mémoire et lui rappeler qu'il l'avait déjà attendu devant les toilettes ? Et que c'était réciproque ? Et puis lui rappeler que les besoins naturels, ce n'était pas un truc réservé aux filles ? Pas besoin d'être mijaurée comme ça. Des gens qui vont aux toilettes, il y en a tout le temps. Même dans le noir. Il se souvenait qu'une fois, chez son père, l'ampoule des toilettes avait sauté pendant qu'il y était, et ça avait été aussi vachement chiant.

Oh, un nouveau bruit de chasse d'eau, à peu près du même endroit.

- Sérieusement Kelsey, je préfère largement que tu me dises que tu vas aux toilettes plutôt que de te cacher comme ça, ça fout les chocottes. Je me répète, je t'aime beaucoup, mais je suis pas très sûr de te pardonner si tu me fais mourir d'une crise cardiaque.

On sentait à sa voix qu'il était quand même de moins en moins rassuré, à cause des farces de son amie. Bon, par nature, il n'était pas hyper sensible aux histoires d'horreur, alors il arrivait à se canaliser, mais quand même, à cause de la timidité de Kelsey, il sursautait un peu trop à son goût.
En fait, il espérait intérieurement qu'elle aurait bientôt fini de se cloîtrer dans le toilette en faisant genre qu'elle n'y était pas, déjà pour moins stressé et parce qu'il se sentait un peu seul, là, adossé à sa cabine vide.

- Euh, wait. Comment ça c'est pas toi ?

Peony oublia tout le reste du discours de Kelsey ; ses dérivations sur son bouquin qu'il n'avait lui-même jamais ouvert, son attitude vexée, ses protestations. Il déglutit difficilement : si ce n'était pas elle, et que ce n'était pas lui, et qu'ils étaient les seules personnes enfermées dans ces toilettes, puisque lui-même avait verrouillé la porte, qui était-ce ?
Ok, ok, pas de panique. Peony était un homme de raison. Il n'y avait pas à s'affoler. Pas même parce qu'il y avait un nouveau bruit de chasse et que Kelsey l'accusait.

- Kelsey. Panique pas mais, c'pas moi. C'pas toi, c'pas moi, mais y'a des bruits de chasse quand même. Siiiii tu voiiiiis ce que je veux diiiiire.

Bon, d'accord, il y avait des fantômes à Poudlard : aux dernières nouvelles, ils ne pouvaient pas intervenir avec le monde des vivants. Bon, des esprits frappeurs aussi, mais sérieusement ? Peony n'en avait pratiquement jamais croisé en cinq ans de scolarité, pourquoi maintenant ?
Est-ce que quelqu'un était caché dans une cabine avant même leur arrivée ? Est-ce que quelqu'un avait transplané ? Quoique, non, ça ne marchait pas.... La plaie. Vraiment, la plaie.
Peony se fit sursauter tout seul en secouant la tête, surpris par le bruit du papier aluminium.

- Kelsey, je sais pas trop où t'es mais je vais essayer de te rejoindre ok ? Si un truc te touche panique pas c'est sans doute moi.

Dans l'incertitude, c'était sans doute le mieux à faire que de se rapprocher d'elle. A tâtons, très lentement, les bras tendus devant lui, il avança dans la pénombre en tentant de se guider à la voix de son amie. Il menaça de tomber à la renverse pace que le sol était un peu humide mais il réussit à conserver l'équilibre et en finalement moins de temps que prévu, sa main toucha le bout du nez de Kelsey.

- Ok c'est bon t'es là. On va éviter de se séparer maintenant ok ? Qu'on arrête de s'faire peur inutilement.

Plutôt que de lui abîmer le nez, il chercha sa main pour la prendre dans la sienne, histoire de ne pas la perdre. Petite précaution. Et puis, d'un coup, un bruit d'eau qui coule fort d'un robinet fut entendu dans ces maudits toilettes.

Peony grogna lorsqu'elle retira sa main de la sienne. Déjà, parce qu'elle réagissait abusivement par rapport à la situation et qu'elle s’imaginait des trucs bizarres, c'était une chose. L'autre chose, c'est que c'était vachement vexant, en tant qu'ami, d'être repoussé comme ça, comme une espèce de pestiféré. Il admettait que la teinture coincé sous les feuilles d'aluminium n'était pas le truc avec la meilleure odeur au monde, mais c'était bon, il était propre, elle le connaissait, et il lui avait juste pris la main, y'avait rien de mal à ça. Surtout si c'était pour se jeter dans ses bras cinq secondes plus tard. Ceci dit, pas très rassuré, Peony passa un bras autour d'elle, parce qu'il n'avait pas envie du tout qu'elle se mette à courir n'importe où et à l'effrayer encore plus.

Bon. Il fallait agir. Rester debout, comme ça, dans les bras l'un de l'autre, aussi rassurant que ce soit, ne ferait pas avancer la situation.

- On va s'rpaprocher de l'évier ok ? Faut au moins qu'on  l'ferme pour pas que ça finisse inondé. Je vais te prendre la main pour pas te perdre en chemin alors hurle pas tu serais gentille.

Le Serpentard éloigna son amie de lui et lui prit le main à nouveau ; un peu plus fermement pour ne pas qu'elle recommence son manège bizarre de tout à l'heure. Guidé par le bruit de l'eau qu'il coule, il avança à tâtons vers le robinet, et trouva le bon lorsqu'il eut la main trempée.

- La vache mais c'est froid ! s'offusque le grand blond.

La main glissante, il ferma le jet d'eau. Ses pieds pataugeaient un peu d'ailleurs, parce que ça avait débordé. Il s'éloigna un peu pour ne pas avoir les chaussettes humides, et fut content de constater que le silence était revenu, même si la situation demeurait vachement angoissante.

- Ok, ok, ça va aller. On va s'détendre et on improvise ensuite. Il essayait de se convaincre en même temps. Ecoute, euuuuh..... on va essayer d'chanter une chanson ok ? L'premier truc qui t'viens... genre, t'sais, le truc pour la chorale de Noël.

Sans attendre son approbation, il se mit à fredonner. Il n'osait pas chanter trop fort, de crainte que ça réveille un espèce de monstre bizarre tapi dans les toilettes, ou que Kelsey lui hurle de la boucler. Une deuxième voix se joint à lui. Kelsey, il imaginait. Sauf que Kelsey n'était pas censée avoir une voix d'homme.... n'est-ce pas ?

Cette soirée de l'horreur apprenait des choses à Peony, l'air de rien. Déjà, que garder de l'aluminium dans les cheveux plus que nécessaire, c'était assez chiant. Ensuite, que Kelsey était une fausse amie : elle ne savait même pas reconnaître sa voix, en dépit de tout ce temps passé à chanter ensemble. Quelle belle relation qui allait prendre fin, si la rationnalité ne reprenait pas le pas sur la peur de sa camarade.

- Kelsey j'ai accepté d'êt' ton ami parce que t'étais plutôt futée comme fille, commence pas à d'venir trop bête par pitié, se plaignit-il.

C'était difficile d'être sensé pour deux, mais là, il n'avait pas trop le choix. De toute évidence, il y avait un problème dans ces toilettes : la lumière n'y marchait plus, et il y avait une troisième personne enfermée avec eux. Et, accessoirement, la magie était partie en vacances, à moins que Peony ne soit définitivement trop nul en sortilèges pour se sortir de ce genre de situation.

- Ok Kelsey, j'vais réessayer d'ouvrir la porte, tu m'suis d'accord ?

De petit pas en petit pas, pour ne pas prendre le risque de glisser dans une flaque d'eau et de tomber, il essaya d'avancer vers un mur pour se repérer, toujours en tenant la main de son amie. Il priait très fort pour ne pas, au passage, traverser un fantôme ou percuter la créature qui se jouait d'eux ce soir.

Sa main finit effectivement par toucher un mur, sans encombres. Il restait à se glisser jusqu'à la porte d'entrée, ce qui ne devrait pas être le plus dur. En soit, le plus compliqué restait de gérer Kelsey.

- T'sais les coupures d'courant chez les moldus ça arrive tout l'temps. Faut pas s'inquiéter.

Bon d'accord, concrètement, il n'y avait pas d'électricité à Poudlard, mais ça valait toujours le coup de le souligner. Elle pourrait comme ça imaginer qu'il avait l'habitude de changer l'ampoule des toilettes dans le noir le plus complet, chez son père. Il état même déjà tombé de l'escabeau, une fois, en le faisant. Enfin ceci dit, aujourd'hui, il était assez grand pour ne plus avoir besoin de l’escabeau.

- Ah ! Trouvé.

Sa main libre avait attrapé la poignet. Il essaya de l'actionner et d'ouvrir la porte, en désespoir de cause, mais pas moyen. Pas moyen du tout.

- Ok. Dans tes livres on t'explique comment crocheter une serrure ?

Histoire que ses lectures horrifiques s'annoncent utiles, un peu.