Défaite
Ils avaient perdu.
Edgar n'avait pas ouvert la bouche depuis qu'il avait félicité les bleus pour leur victoire. Il était content pour eux, après tout c'était ses amis dans cette équipe, mais. Mais il l'avait en travers de la gorge, alors il se taisait. Il laissa la déception ronger son ventre pendant qu'il se rhabillait, puis qu'il montait les escaliers, même lorsqu'il passa le tableau de la salle commune. Dans sa tête ça tournait : Défaite. Il était déçu, frustré, agacé. Edgar n'aimait pas perdre, non pas parce qu'il voulait être premier, mais parce qu'il voulait son équipe première, et là... c'était mal parti pour être le cas.
Il soupira et s'apprêta à se laisser tomber dans un fauteuil un peu plus loin quand un troisième année s'y installa, là, juste sous son nez. Il ne l'avait pas vu, c'était évident, et puis Edgar était à quatre bons mètres du siège, mais, malgré tout, il fusilla d'un regard assassin le gamin qu'il haïssait déjà. Voilà. Il était énervé et ça montait vite, trop vite. Ils avaient perdu.
Il croisa ses bras sur son torse, puis fit un tour lent sur lui-même, cherchant un endroit où il pourrait s'affaler et se laisser avaler par le brouhaha. Il sentait le besoin d'être entouré d'une masse d'élève au même titre que l'agacement dans ses veines, provoqué par cette même masse. Et puis il croisa un regard sombre d'une aînée bien connue. Oh... Il se frotta les mains, attentif brusquement à la jeune femme. Il était énervé, il voulait autant le calme que le boucan, il était déçu. Ils avaient perdu. Il avait besoin de lâcher prise, elle était parfaite.
Il traversa la salle commune et se stoppa face à elle.
-Qu'est-ce que tu veux au juste ? Le ton glacial, le rejet évident. Proserpine n'allait pas se laisser faire et ça bloqua la réflexion débile qu'Edgar préparait. L'envie de lui envoyer sa frustration à la tête tomba aussi vite qu'elle était venue ; il croisa les bras et soupira. Au moins, maintenant, elle réagissait à sa présence.
-Bonjour, Proserpine, finit-il par dire, glissant un léger sourire,
comment vas-tu ?Il n'avait rien trouvé de mieux. Ils avaient perdu. C'était entre la remarque acerbe et celle normal, c'était... c'était un moyen de s'occuper la tête, parce qu'il avait perdu.
-J'espère que ça ne te dérange pas que je te tienne compagnie, enchaîna-t-il en s'appuyant contre le meuble à côté d'elle, lui signifiant ainsi qu'il se fichait bien que ça la dérange ou non.
Il avait, néanmoins, le visage un peu plus sombre...